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28/09/2014

L'Allemagne va-t-elle dépénaliser l'inceste ?

Rédigé par Adélaïde Pouchol le 26 septembre 2014

Tout commence avec un cas particulier largement médiatisé. L’histoire se passe en 2007 à Leibzig, en Allemagne. Un frère et sa sœur, parents de quatre enfants, sont condamnés par la justice de leur pays et saisissent la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Mineure à la naissance du premier enfant, la femme n’est pas condamnée, contrairement à son frère. Au fil des années et de l’arrivée d’autres enfants, les amendes et peines de prison s’enchaînent. Il passe plusieurs années en prison, elle est placée en programme de réinsertion sociale. Deux des quatre enfants nés de cette union sont nés handicapés mais depuis, l’homme s’est fait stériliser. Dès lors, la condamnation « n’a plus lieu d’être », estime son avocat…

Ce cas ne serait pas isolé, selon une étude publiée en juillet 2014 par l’Institut Max Planck selon laquelle l’inceste concerne entre 2 et 4% de la population allemande. Mais l’étude précise également que l’inceste se produit le plus souvent dans des environnements familiaux difficiles, de familles décomposées, socialement faibles ou en grande difficulté. Pure coïncidence ?

Un interdit fondateur

Sept ans après la condamnation du frère et de la soeur, ce 24 septembre 2014, le Conseil d’éthique allemand a rendu un avis sur la question de l’inceste et estime, à 14 membres contre 9, que l’Allemagne devrait dépénaliser cette pratique pourvu que la relation soit entre adultes consentants. La pénalisation de l’inceste serait, d’une part, contraire à l’autodétermination sexuelle et, d’autre part, inutile au maintien de l’ordre déjà garanti par l’interdit du viol et des agressions sexuelles. « Protéger un tabou social et fixer des barrières morales ne relève pas du droit pénal », estime encore le Conseil.

Les Sages allemands ont raison, le droit pénal n’a pas à fixer de barrières morales. Non, le droit positif ne fixe pas de normes morales, il en est garant. Car l’inceste n’est pas mauvais parce que interdit par la loi civile, mais parce que contraire à la loi naturelle. Cette pratique fait partie des « interdits fondamentaux » portés par la plupart des civilisations, comme l’interdit du meurtre ou du viol quoique ces interdits puissent être formulés de manière variable : ces normes garantissent la pérennité de toute société. Au-delà des troubles génétiques qu’il cause, l’inceste bouleverse le lien de filiation en ajoutant au lien de parenté un lien matrimonial. C’est une perversion de la structure familiale pourtant fondatrice de la vie en société.

De l'Allemagne à l'Europe

En Allemagne ou ailleurs, les partisans de la dépénalisation de l’inceste avancent sensiblement les mêmes arguments : on ne peut contrevenir à la liberté de deux adultes consentants, on ne peut sanctionner l’amour mais on se doit de faire tomber les tabous sur la sexualité… Paradoxalement, ce sont les mêmes qui ont milité pour l’avortement, se battent aujourd’hui pour l’élimination des fœtus porteurs de handicaps (rappelons qu’en France, 96 % des enfants dépistés trisomiques sont avortés dans l’indifférence générale) qui estiment que refuser l’inceste car il multiplie les risques de handicap pour l’enfant relève de l’eugénisme. Les personnes handicapées ont bon dos…

Cette possible évolution de la loi allemande ne fait, hélas, que suivre un mouvement déjà largement amorcé par plusieurs pays occidentaux, dont la France qui estime que « l’inceste, c’est-à-dire le rapport sexuel entre deux personnes qui sont parents à un degré où le mariage est interdit, ne constitue pas une infraction spécifique. Si la relation est librement consentie et concerne deux personnes qui ont dépassé l’âge de la majorité sexuelle, fixé à 15 ans dans notre pays, elle ne tombe pas sous le coup du code pénal » (note de synthèse du Sénat, 25 novembre 2014).

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