Journée mondiale de l'environnement: les réfugiés climatiques à la recherche d'une protection
Emmanuelle Réju | 5 juin 2014
La journée mondiale de l’environnement, ce jeudi 5 juin, met l’accent cette année sur les petits États insulaires en développement.
Leur population, comme d’autres dans le monde, est menacée par les changements climatiques mais n’a pas encore de protection internationale.
Qui sont les « réfugiés climatiques » ?
Depuis cinq ans, 30 à 40 millions de personnes dans le monde doivent partir chaque année de chez elles à la suite d’une catastrophe naturelle, de sécheresses à répétition ou d’une modification radicale de leur environnement. Si le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), dans son dernier rapport de mars 2014, ne se risquait pas à faire de prévisions, l’économiste Nicholas Stern estime à 200 millions les « déplacés environnementaux » en 2050.
Deux phénomènes se conjuguent pour forcer certaines populations à quitter leur territoire : des événements brutaux, comme ouragans ou inondations, qui seront amenés à se multiplier sous l’effet du réchauffement climatique ; et des bouleversements progressifs tels que l’élévation du niveau des mers ou l’aggravation des sécheresses qui rendront certaines terres inhabitables. Des phénomènes s’avèrent déjà inquiétants, tels que la submersion d’archipels dans le Pacifique, les inondations au Bangladesh ou dans le delta du Nil ou l’extension du désert de Gobi en Chine.
Les pays du Sud ne sont pas les seuls touchés : l’ouragan Sandy a entraîné 800 000 déplacés aux États-Unis en 2012. Reste que la quasi-totalité des mouvements de population se produit entre pays en développement et non pas du « Sud » vers le « Nord ».
Quelle protection leur accorder ?
Un temps évoqué, l’idée d’accorder à ces personnes un statut de « réfugié climatique » en étendant le périmètre de la convention de Genève suscite de très vives résistances. « Dans un contexte de mise en cause croissante du droit d’asile, celui-ci doit rester un concept juridique clairement délimité », plaide Me Yvon Martinet.
Un habitant de Kiribati, qui demandait l’asile en Nouvelle-Zélande au titre du changement climatique en octobre dernier, a d’ailleurs été débouté. Par ailleurs, un tel statut – qui induit une migration entre deux pays – ne prendrait pas en compte la majorité des cas qui voient les personnes se déplacer au sein même de leur pays.
Potentiellement explosif, le sujet est prudemment écarté du menu des négociations onusiennes sur le climat. « Cette question n’est pas formellement du ressort de la convention sur le climat, explique un diplomate français qui prépare la grande conférence de Paris en 2015. Et nous devons nous concentrer sur l’essentiel : réussir à maîtriser le changement climatique en réduisant nos émissions de gaz à effet de serre et mettre en place des stratégies d’adaptation. Justement pour éviter d’en arriver à ces déplacements de population ! »
Le sujet est-il abandonné ?
Des initiatives se multiplient, en parallèle des négociations officielles. Ainsi, des conférences internationales – organisées régulièrement sous l’égide de la Suisse et de la Norvège – se proposent d’élaborer un consensus mondial sur la question. Baptisée Initiative Nansen, le mouvement veut formaliser des propositions d’ici à octobre 2015. La France a rejoint le groupe des États amis de l’Initiative Nansen en février dernier.
Par ailleurs, le barreau de Paris doit présenter aujourd’hui lors des Ateliers de la Terre son projet de convention internationale sur les déplacés environnementaux. « L’objectif de cette convention serait d’assurer un droit au retour aux personnes déplacées et si ce retour s’avère impossible, de leur offrir des conditions d’accueil dans d’autre pays », explique le porteur du projet Me Yvon Martinet. Ce dernier l’assure : ce projet de texte aurait reçu un bon accueil au quai d’Orsay.
EMMANUELLE RÉJU (La Croix)
Écrit par Espérance Nouvelle Lien permanent | Commentaires (0)
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