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03/01/2015

Lecture par parties de la Lettre aux Familles de Jean-Paul II (11)

91419205jean-paul-ii-et-mere-teresa-jpg.jpgL'Année de la Famille (1994) donnait l'occasion au Saint Pape Jean-Paul II d'écrire aux familles pour "frapper à la porte de votre maison, moi qui voudrais vous saluer avec une grande affection et m'entretenir avec vous".

Cette lettre nous donne quelques perles tirées de l'Enseignement de l'Eglise dont nous livrons quelques extraits (dont voici le 11e paragraphe de la lettre)

Le don désintéressé de soi

11. Quand il affirme que l'homme est l'unique créature sur terre voulue de Dieu pour elle-même, le Concile ajoute aussitôt qu'il « ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé de lui-même » (25). Cela pourrait sembler contradictoire, mais ce ne l'est nullement. C'est plutôt le grand et merveilleux paradoxe de l'existence humaine : une existence appelée à servir la vérité dans l'amour. L'amour amène l'homme à se réaliser par le don désintéressé de lui-même. Aimer signifie donner et recevoir ce qu'on ne peut ni acquérir ni vendre, mais seulement accorder librement et mutuellement.

Le don de la personne requiert par nature d'être durable et irrévocable. L'indissolubilité du mariage découle en premier lieu de l'essence de ce don : don de la personne à la personne. Dans ce don réciproque est manifesté le caractère sponsal de l'amour. Dans le consentement matrimonial, les fiancés s'appellent par leur nom: « Moi... je te prends... pour épouse (pour époux) et je promets de te rester fidèle... tous les jours de ma vie ». Un tel don lie beaucoup plus fortement et beaucoup plus profondément que tout ce qui peut être « acquis » de quelque manière et à quelque prix que ce soit. Fléchissant les genoux devant le Père, de qui vient toute paternité et toute maternité, les futurs parents deviennent conscients d'avoir été « rachetés ». En effet, ils ont été acquis à grand prix, au prix du don le plus désintéressé qui soit, le sang du Christ, auquel ils participent par le sacrement. Le couronnement liturgique du rite matrimonial est l'Eucharistie — sacrifice du « corps donné » et du « sang répandu » —, qui trouve en quelque sorte son expression dans le consentement des époux.

Quand, dans le mariage, l'homme et la femme se donnent et se reçoivent réciproquement dans l'unité d'« une seule chair », la logique du don désintéressé entre dans leur vie. Sans elle, le mariage serait vide, alors que la communion des personnes, édifiée suivant cette logique, devient la communion des parents. Quand les époux transmettent la vie à leur enfant, un nouveau « tu » humain s'inscrit sur l'orbite de leur « nous », une personne qu'ils appelleront d'un nom nouveau : « Notre fils... ; notre fille... ». « J'ai acquis un homme de par le Seigneur » (Gn 4, 1), dit Eve, la première femme de l'histoire : un être humain, d'abord attendu pendant neuf mois puis « manifesté » aux parents, aux frères et sœurs. Le processus de la conception et du développement dans le sein maternel, de l'accouchement, de la naissance, tout cela sert à créer comme un espace approprié pour que la nouvelle créature puisse se manifester comme « don », car c'est ce qu'elle est dès le début. Cet être fragile et sans défense, dépendant de ses parents pour tout et entièrement remis à leurs soins, pourrait-il être désigné autrement ? Le nouveau-né se donne à ses parents par le fait même de venir au jour. Son existence est déjà un don, le premier don du Créateur à la créature.

Dans le nouveau-né se réalise le bien commun de la famille. De même que le bien commun des époux s'achève dans l'amour sponsal, prêt à donner et à accueillir la nouvelle vie, ainsi le bien commun de la famille se réalise par le même amour sponsal concrétisé dans le nouveau-né. Dans la généalogie de la personne est inscrite la généalogie de la famille, portée sur les registres des baptêmes en perpétuelle mémoire, même si cet enregistrement n'est que la conséquence sociale du fait « qu'un homme est venu au monde » (cf. Jn 16, 21).

Mais est-il vrai que le nouvel être humain est un don pour les parents ? Que c'est un don pour la société ? Apparemment rien ne semble l'indiquer. La naissance d'un homme paraît être parfois une simple donnée statistique, enregistrée comme tant d'autres dans les bilans démographiques. Certes, la naissance d'un enfant signifie, pour les parents, des fatigues à venir, de nouvelles charges économiques, d'autres contraintes pratiques : autant de motifs qui peuvent susciter en eux la tentation de ne pas désirer une autre naissance (26). Dans certains milieux sociaux et culturels, cette tentation se fait plus forte. L'enfant n'est donc pas un don ? Vient-il seulement pour prendre et non pour donner ? Voilà quelques questions inquiétantes, dont l'homme d'aujourd'hui a du mal à se libérer. L'enfant vient prendre de la place, alors que dans le monde l'espace semble se faire toujours plus rare. Mais est-il vrai qu'il n'apporte rien à la famille et à la société ? Ne serait-il pas un « élément » du bien commun sans lequel les communautés humaines se désagrègent et risquent la mort ? Comment le nier ? L'enfant fait don de lui-même à ses frères, à ses sœurs, à ses parents, à toute sa famille. Sa vie devient un don pour les auteurs mêmes de la vie, qui ne pourront pas ne pas sentir la présence de leur enfant, sa participation à leur existence, son apport à leur bien commun et à celui de la communauté familiale. C'est là une vérité qui demeure évidente dans sa simplicité et sa profondeur, malgré la complexité, et aussi l'éventuelle pathologie, de la structure psychologique de certaines personnes. Le bien commun de la société entière réside dans l'homme, qui, comme on l'a rappelé, est « la route de l'Eglise » (27). Il est avant tout la « gloire de Dieu » : « Gloria Dei vivens homo », « la gloire de Dieu, c'est l'homme vivant », selon la formule bien connue de saint Irénée (28), qui pourrait aussi se traduire : « La gloire de Dieu, c'est que l'homme vive ». Nous sommes ici, pourrait-on dire, en présence de la plus haute définition de l'homme : la gloire de Dieu est le bien commun de tout ce qui existe ; c'est le bien commun du genre humain.

Oui, l'homme est un bien commun : bien commun de la famille et de l'humanité, des divers groupes et des multiples structures sociales. Il faut faire toutefois une distinction significative de degré et de modalité : par exemple, l'homme est le bien commun de la nation à laquelle il appartient ou de l'Etat dont il est le citoyen ; mais il l'est d'une façon bien plus concrète, absolument unique, pour sa famille ; il l'est non seulement comme individu qui fait partie de la multitude humaine, mais comme « cet homme ». Dieu Créateur l'appelle à l'existence « pour lui-même », et, lorsqu'il vient au monde, l'homme commence, dans la famille, sa « grande aventure », l'aventure de la vie. « Cet homme », en tout cas, a le droit de s'affirmer lui- même en raison de sa dignité humaine. C'est précisément cette dignité qui doit déterminer la place de la personne parmi les hommes, et avant tout dans la famille. Car, plus que toute autre réalité humaine, la famille est le milieu dans lequel l'homme peut exister « pour lui-même » par le don désintéressé de soi. C'est pourquoi elle reste une institution sociale qu'on ne peut pas et qu'on ne doit pas remplacer : elle est « le sanctuaire de la vie » (29).

Le fait que naît un homme, qu'« un être humain est venu au monde » (cf. Jn 16, 21), constitue un signe pascal. Jésus lui-même en parle à ses disciples, selon l'évangéliste Jean, avant sa passion et sa mort, comparant la tristesse causée par son départ à la souffrance d'une femme qui enfante : « La femme, sur le point d'accoucher, s'attriste (c'est-à-dire souffre) parce que son heure est venue ; mais, lorsqu'elle a donné le jour à l'enfant, elle ne se souvient plus des douleurs, dans la joie qu'un homme soit venu au monde » (Jn 16, 21). L'« heure » de la mort du Christ (cf. Jn 13, 1) est ici comparée à l'« heure » de la femme dans les douleurs de l'enfantement ; la naissance d'un nouvel homme se compare à la victoire de la vie sur la mort remportée par la résurrection du Seigneur. Ce rapprochement suscite diverses réflexions. De même que la résurrection du Christ est la manifestation de la Vie au-delà du seuil de la mort, de même la naissance d'un enfant est aussi manifestation de la vie, toujours destinée, par le Christ, à la « plénitude de la Vie » qui est en Dieu même : « Je suis venu pour qu'on ait la vie, et qu'on l'ait surabondante » (Jn 10, 10). Voilà révélé dans sa valeur profonde le vrai sens de l'expression de saint Irénée : « Gloria Dei vivens homo ».

C'est la vérité évangélique du don de soi, sans lequel l'homme ne peut « pleinement se trouver », qui permet de comprendre à quelle profondeur ce « don désintéressé » s'enracine dans le don du Dieu Créateur et Rédempteur, dans « la grâce de l'Esprit Saint » dont le célébrant demande l'effusion sur les époux au cours de la cérémonie du mariage. Sans cette « effusion », il serait vraiment difficile de comprendre tout cela et de le réaliser comme la vocation de l'homme. Mais bien des personnes comprennent cela ! Beaucoup d'hommes et de femmes accueillent cette vérité et arrivent à entrevoir que c'est en elle seulement qu'ils trouvent « la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6). Sans cette vérité, la vie des époux et de la famille ne peut parvenir à son sens pleinement humain.

Voilà pourquoi l'Eglise ne se lasse jamais d'enseigner cette vérité et de lui rendre témoignage. Tout en faisant preuve de compréhension maternelle pour les nombreuses et complexes situations de crise dans lesquelles les familles se trouvent impliquées et pour la fragilité morale de tout être humain, l'Eglise est convaincue qu'elle doit absolument demeurer fidèle à la vérité sur l'amour humain ; autrement, elle se trahirait elle-même. S'éloigner de cette vérité salvifique serait en effet comme fermer « les yeux du cœur » (Ep 1, 18), qui doivent au contraire rester toujours ouverts à la lumière que l'Evangile projette sur les vicissitudes de l'humanité (cf. 2 Tm 1, 10). La conscience de ce don de soi désintéressé par lequel l'homme « se trouve lui-même » est à renouveler sérieusement et à garantir constamment, face aux nombreuses oppositions que l'Eglise rencontre de la part des partisans d'une fausse civilisation du progrès (30). La famille exprime toujours une nouvelle dimension du bien pour les hommes, et c'est pourquoi elle crée une nouvelle responsabilité. Il s'agit de la responsabilité pour le bien commun particulier où réside le bien de l'homme, le bien de tout membre de la communauté familiale. Certes, c'est un bien « difficile », (« bonum arduum »), mais c'est aussi un bien merveilleux.

> Lecture du paragraphe 7 de la Lettre aux Familles

> Lecture du paragraphe 8 de la Lettre aux Familles

> Lecture du paragraphe 9 de la Lettre aux Familles

> Lecture du paragraphe 10 de la Lettre aux Familles

> Lire la Lettre aux Familles dans son intégralité sur le site officiel du Saint-Siège

13:23 Publié dans Famille, Pape | Lien permanent | Commentaires (0)

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