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07/10/2015

Encyclique Veritatis Splendor sur l'enseignement moral de l'Église - II - "Certaines positions théologiques, répandues même dans des séminaires et des facultés de théologie..."

 

LETTRE ENCYCLIQUE
VERITATIS SPLENDOR
DU SOUVERAIN PONTIFE
JEAN-PAUL II
À TOUS LES ÉVÊQUES
DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE
SUR QUELQUES QUESTIONS FONDAMENTALES
DE L'ENSEIGNEMENT MORAL DE L'ÉGLISE

 

(...)

L'objet de la présente encyclique

4. Depuis toujours, mais particulièrement au cours des deux derniers siècles, les Souverains Pontifes, personnellement ou avec le Collège épiscopal, ont développé et proposé un enseignement moral sur les multiples aspects différents de la vie humaine. Au nom du Christ et avec son autorité, ils ont exhorté, dénoncé et expliqué ; fidèles à leur mission, dans les combats en faveur de l'homme, ils ont conforté, soutenu et consolé ; avec la certitude de l'assistance de l'Esprit de vérité, ils ont contribué à une meilleure intelligence des exigences morales dans le domaine de la sexualité humaine, de la famille, de la vie sociale, économique et politique. Dans la tradition de l'Eglise et dans l'histoire de l'humanité, leur enseignement constitue un approfondissement incessant de la connaissance morale 8.

Aujourd'hui, cependant, il paraît nécessaire de relire l'ensemble de l'enseignement moral de l’Église, dans le but précis de rappeler quelques vérités fondamentales de la doctrine catholique, qui risquent d'être déformées ou rejetées dans le contexte actuel. En effet, une nouvelle situation est apparue dans la communauté chrétienne elle-même, qui a connu la diffusion de nombreux doutes et de nombreuses objections, d'ordre humain et psychologique, social et culturel, religieux et même proprement théologique, au sujet des enseignements moraux de l’Église. Il ne s'agit plus d'oppositions limitées et occasionnelles, mais d'une mise en discussion globale et systématique du patrimoine moral, fondée sur des conceptions anthropologiques et éthiques déterminées. Au point de départ de ces conceptions, on note l'influence plus ou moins masquée de courants de pensée qui en viennent à séparer la liberté humaine de sa relation nécessaire et constitutive à la vérité. Ainsi, on repousse la doctrine traditionnelle de la loi naturelle, de l'universalité et de la validité permanente de ses préceptes ; certains enseignements moraux de l'Eglise sont simplement déclarés inacceptables ; on estime que le Magistère lui-même ne peut intervenir en matière morale que pour « exhorter les consciences » et « pour proposer les valeurs » dont chacun s'inspirera ensuite, de manière autonome, dans ses décisions et dans ses choix de vie.

Il faut noter, en particulier, la discordance entre la réponse traditionnelle de l’Église et certaines positions théologiques, répandues même dans des séminaires et des facultés de théologie,sur des questions de première importance pour l’Église et pour la vie de foi des chrétiens, ainsi que pour la convivialité humaine. On s'interroge notamment : les commandements de Dieu, qui sont inscrits dans le cœur de l'homme et qui appartiennent à l'Alliance, ont-ils réellement la capacité d'éclairer les choix quotidiens de chaque personne et des sociétés entières ? Est-il possible d'obéir à Dieu, et donc d'aimer Dieu et son prochain, sans respecter ces commandements dans toutes les situations ? L'opinion qui met en doute le lien intrinsèque et indissoluble unissant entre elles la foi et la morale est répandue, elle aussi, comme si l'appartenance à l’Église et son unité interne devaient être décidées uniquement par rapport à la foi, tandis qu'il serait possible de tolérer en matière morale une pluralité d'opinions et de comportements, laissés au jugement de la conscience subjective individuelle ou dépendant de la diversité des contextes sociaux et culturels.

5. Dans un tel contexte, toujours actuel, la décision a mûri en moi d'écrire — comme je l'annonçais déjà dans la Lettre apostolique Spiritus Domini, publiée le 1er août 1987 à l'occasion du deuxième centenaire de la mort de saint Alphonse-Marie de Liguori — une encyclique destinée à traiter « plus profondément et plus amplement les questions concernant les fondements mêmes de la théologie morale » 9, fondements qui sont attaqués par certains courants contemporains.

Je m'adresse à vous, vénérés Frères dans l'épiscopat qui partagez avec moi la responsabilité de garder « la saine doctrine » (2 Tm 4, 3), dans l'intention de préciser certains aspects doctrinaux qui paraissent déterminants pour faire face à ce qui est sans aucun doute une véritable crise, tant les difficultés entraînées sont graves pour la vie morale des fidèles, pour la communion dans l’Église et aussi pour une vie sociale juste et solidaire.

Si cette encyclique, attendue depuis longtemps, n'est publiée que maintenant, c'est notamment parce qu'il est apparu opportun de la faire précéder du Catéchisme de l’Église catholique, qui contient un exposé complet et systématique de la doctrine morale chrétienne. Le catéchisme présente la vie morale des croyants, dans ses fondements et dans les multiples aspects de son contenu, comme une vie de « fils de Dieu » : « En reconnaissant dans la foi leur dignité nouvelle, les chrétiens sont appelés à mener désormais une " vie digne de l’Évangile " (Ph 1, 27). Par les sacrements et la prière, ils reçoivent la grâce du Christ et les dons de son Esprit qui les en rendent capables » 10. En renvoyant donc au Catéchisme « comme texte de référence sûr et authentique pour l'enseignement de la doctrine catholique » 11, l'encyclique se limitera à développer quelques questions fondamentales de l'enseignement moral de l'Eglise, en pratiquant un nécessaire discernement sur des problèmes controversés entre les spécialistes de l'éthique et de la théologie morale. C'est là l'objet précis de la présente encyclique, qui entend exposer, sur les problèmes en discussion, les raisons d'un enseignement moral enraciné dans l'Ecriture Sainte et dans la Tradition apostolique vivante 12, en mettant simultanément en lumière les présupposés et les conséquences des contestations dont cet enseignement a été l'objet.

(...)

 

Encyclique Veritatis Splendor sur quelques question fondamentales de l'enseignement moral de l’Église.

 

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8 Pio XII had already pointed out this doctrinal development: cf "Radio Message" for the Fiftieth Anniversary of the Encyclical Letter "Rerum Novarum" of Leo XIII (1 Giugno 1941): AAS 33 (1941), 195-205. Also JOHN XXIII, Encyclical Letter "Mater et Magistra" (15 Maggio 1961): AAS 53 (1961), 410-413.

9 Lettera Apostolica Spiritus Domini (1 Agosto 1987): AAS 79(1987), 1374.

10 Catechismo della Chiesa Cattolica, n. 1692.

11 Cost. Apost. Fidei Depositum (11 Ottobre 1992), 4.

12 Cf CONC. ECUM. VAT. II, Cost. past. sulla Divina Rivelazione Dei Verbum, 10.

 

Encyclique Arcanum Divinae sur le mariage chrétien - II - "Il n'est du pouvoir de personne de le délier ou de le rompre"

 

ARCANUM DIVINAE

 

LETTRE ENCYCLIQUE
DE SA SAINTETÉ LE PAPE LÉON XIII
SUR LE MARIAGE CHRÉTIEN

 

(...)

Tout le monde sait, Vénérables Frères, quelle est la véritable origine du mariage. Les détracteurs de la foi chrétienne refusent d'admettre en cette matière la doctrine constante de l’Église. Ils veulent, depuis longtemps déjà, détruire la tradition de tous les peuples et de tous les siècles. Malgré leurs efforts, ils n'ont pu, ni éteindre, ni affaiblir la force et l'éclat de la vérité. Nous rappelons donc des choses qui sont connues de tous et ne font doute pour personne.

Après avoir, au sixième jour de la création, formé l'homme du limon de la terre, et après avoir envoyé sur sa face le souffle de vie, Dieu voulut lui adjoindre une compagne, qu'il tira merveilleusement du flanc de l'homme endormi. En agissant ainsi, Dieu voulut, dans sa très haute providence, que ce couple fût l'origine naturelle de tous les hommes et qu'il servît à la propagation du genre humain et à sa conservation dans tous les temps par une série ininterrompue de générations.

Afin de répondre plus parfaitement aux très sages desseins de Dieu, cette union de l'homme et de la femme se présenta, dès ce temps-là, avec deux propriétés principales et nobles entre toutes, qui lui furent pour ainsi dire profondément imprimées et gravées, à savoir l'unité et la perpétuité. C'est ce que nous voyons déclaré et ouvertement confirmé dans l’Évangile par la divine autorité de Jésus-Christ. Selon l'affirmation qu'il fit aux Juifs et aux apôtres, le mariage, en vertu de son institution même, ne doit exister qu'entre deux personnes, c'est-à-dire entre l'homme et la femme : des deux il se forme comme une seule chair, et le lien nuptial est, de par la volonté de Dieu, si intimement et si fortement noué, qu'il n'est au pouvoir de personne de le délier ou de le rompre. L'homme s'attachera à son épouse, et ils seront deux en une seule chair. C'est pourquoi ils ne sont déjà plus deux, mais une seule chair. Que l'homme ne sépare donc point ce que Dieu a uni (Matth. XIX, 5-6).

(...)

 

Encyclique Arcanum Divinae sur le mariage chrétien

 

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06/10/2015

Encyclique Veritatis Splendor sur l'enseignement moral de l'Église - I - "La splendeur de la vérité se reflète dans toutes les oeuvres du Créateur..."

 

LETTRE ENCYCLIQUE
VERITATIS SPLENDOR
DU SOUVERAIN PONTIFE
JEAN-PAUL II
À TOUS LES ÉVÊQUES
DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE
SUR QUELQUES QUESTIONS FONDAMENTALES
DE L'ENSEIGNEMENT MORAL DE L'ÉGLISE

 

Bénédiction

Vénérés Frères dans l'épiscopat,
salut et Bénédiction apostolique!

LA SPLENDEUR DE LA VERITE se reflète dans toutes les œuvres du Créateur et, d'une manière particulière, dans l'homme créé à l'image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26) : la vérité éclaire l'intelligence et donne sa forme à la liberté de l'homme, qui, de cette façon, est amené à connaître et à aimer le Seigneur. C'est dans ce sens que prie le psalmiste : « Fais lever sur nous la lumière de ta face » (Ps 4, 7).

 

INTRODUCTION

 

Jésus Christ, lumière véritable qui illumine tout homme

1. Appelés au salut par la foi en Jésus Christ, « lumière véritable qui éclaire tout homme » (Jn 1, 9), les hommes deviennent « lumière dans le Seigneur » et « enfants de la lumière » (Ep 5, 8), et ils se sanctifient par « l'obéissance à la vérité » (1 P 1, 22).

Cette obéissance n'est pas toujours facile. A la suite du mystérieux péché originel, commis à l'instigation de Satan, « menteur et père du mensonge » (Jn 8, 44), l'homme est tenté en permanence de détourner son regard du Dieu vivant et vrai pour le porter vers les idoles (cf. Th 1, 9), échangeant « la vérité de Dieu contre le mensonge » (Rm 1, 25) ; même la capacité de connaître la vérité se trouve alors obscurcie et sa volonté de s'y soumettre, affaiblie. Et ainsi, en s'abandonnant au relativisme et au scepticisme (cf. Jn 18, 38), l'homme recherche une liberté illusoire en dehors de la vérité elle-même.

Mais les ténèbres de l'erreur et du péché ne peuvent supprimer totalement en l'homme la lumière du Dieu Créateur. De ce fait, la nostalgie de la vérité absolue et la soif de parvenir à la plénitude de sa connaissance demeurent toujours au fond de son cœur. L'inépuisable recherche humaine dans tous les domaines et dans tous les secteurs en est la preuve éloquente. Sa recherche du sens de la vie le montre encore davantage. Le développement de la science et de la technique, magnifique témoignage des capacités de l'intelligence et de la ténacité des hommes, ne dispense pas l'humanité de se poser les questions religieuses essentielles ; il la pousse plutôt à affronter les combats les plus douloureux et les plus décisifs, ceux du cœur et de la conscience morale.

2. Aucun homme ne peut se dérober aux questions fondamentales : Que dois-je faire ? Comment discerner le bien du mal ? La réponse n'est possible que grâce à la splendeur de la vérité qui éclaire les profondeurs de l'esprit humain, comme l'atteste le psalmiste : « Beaucoup disent : " Qui nous fera voir le bonheur ? " Fais lever sur nous, Seigneur, la lumière de ta face » (Ps 4, 7).

La lumière de la face de Dieu brille de tout son éclat sur le visage de Jésus Christ, « image du Dieu invisible » (Col 1, 15), « resplendissement de sa gloire » (He 1, 3), « plein de grâce et de vérité » (Jn 1, 14) : il est « le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6). De ce fait, la réponse décisive à toute interrogation de l'homme, en particulier à ses interrogations religieuses et morales, est donnée par Jésus Christ ; bien plus, c'est Jésus Christ lui-même, comme le rappelle le deuxième Concile du Vatican : « En réalité, le mystère de l'homme ne s'éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné. Adam, en effet, le premier homme, était la figure de Celui qui devait venir, le Christ Seigneur. Nouvel Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement l'homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation » 1.

Le Christ, « la lumière des nations », éclaire le visage de son Eglise, qu'il envoie dans le monde entier pour annoncer l'Evangile à toute créature (cf. Mc 16, 15) 2. Ainsi, peuple de Dieu au milieu des nations 3, l'Eglise, attentive aux nouveaux défis de l'histoire et aux efforts que les hommes accomplissent dans la recherche du sens de la vie, propose à tous la réponse qui vient de la vérité de Jésus Christ et de son Evangile. L'Eglise a toujours la vive conscience de son « devoir, à tout moment, de scruter les signes des temps, et de les interpréter à la lumière de l'Evangile, de telle sorte qu'elle puisse répondre, d'une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future et sur leurs relations réciproques » 4.

3. Les pasteurs de l'Eglise, en communion avec le Successeur de Pierre, sont proches des fidèles dans cet effort, les accompagnent et les guident par leur magistère, trouvant des expressions toujours nouvelles de l'amour et de la miséricorde pour se tourner non seulement vers les croyants, mais vers tous les hommes de bonne volonté. Le Concile Vatican II demeure un témoignage extraordinaire de cette attitude de l'Eglise qui, « experte en humanité » 5, se met au service de tout homme et du monde entier 6.

L'Eglise sait que la question morale rejoint en profondeur tout homme, implique tous les hommes, même ceux qui ne connaissent ni le Christ et son Evangile, ni même Dieu. Elle sait que précisément sur le chemin de la vie morale la voie du salut est ouverte à tous, comme l'a clairement rappelé le Concile Vatican II : « Ceux qui, sans qu'il y ait de leur faute, ignorent l'Evangile du Christ et son Eglise, mais cherchent pourtant Dieu d'un cœur sincère, et s'efforcent, sous l'influence de sa grâce, d'agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte, ceux-là peuvent arriver au salut éternel ». Et il ajoute : « A ceux-là mêmes qui, sans faute de leur part, ne sont pas encore parvenus à une connaissance expresse de Dieu, mais travaillent, non sans la grâce divine, à avoir une vie droite, la divine Providence ne refuse pas les secours nécessaires à leur salut. En effet, tout ce qui, chez eux, peut se trouver de bon et de vrai, l'Eglise le considère comme une préparation évangélique et comme un don de Celui qui illumine tout homme pour que, finalement, il ait la vie » 7.

(...)

 

Encyclique Veritatis Splendor sur quelques question fondamentales de l'enseignement moral de l’Église.

 

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1 Cost. past. sulla Chiesa nel mondo contemporaneo Gaudium et spes, 22.

2 Cf CONC. ECUM. VAT. II, Cost. past. sulla Chiesa Lumen Gentium, 1.

3 Cf ibid., 9.

4 CONC. ECUM. VAT. II, Cost. past. sulla Chiesa nel mondo contemporaneo Gaudium et spes, 4.

5 PAOLO VI, Allocuzione all’Assemblea Generale delle Nazioni Unite (4 Ottobre 1965), 1: AAS 57 (1965), 878; cf Lett. Enc. Populorum Progressio (26 Marzo 1967), 13: AAS 59 (1967), 263-264.

6 Cf CONC. ECUM. VAT. II, Cost. past. sulla Chiesa nel mondo contemporaneo Gaudium et spes, 16.

7 Cost. past. sulla Chiesa Lumen Gentium, 16.

 

Encyclique Arcanum Divinae sur le mariage chrétien - I - "Le mystérieux dessein de la sagesse divine..."

 

ARCANUM DIVINAE

 

LETTRE ENCYCLIQUE
DE SA SAINTETÉ LE PAPE LÉON XIII
SUR LE MARIAGE CHRÉTIEN

 

Aux Patriarches, Primats, Archevêques, et Évêques du monde catholique en grâce et communion avec le Siège apostolique.

Le mystérieux dessein de la sagesse divine que Jésus-Christ, le sauveur des hommes, devait accomplir sur terre, était de restaurer divinement par Lui et en Lui le monde, atteint d'une espèce de sénilité. C'est ce que l'apôtre saint Paul exprimait en termes magnifiques lorsqu'il écrivait aux Ephésiens : Le mystère de sa volonté... c'est de restaurer dans le Christ toutes les choses qui sont au ciel et sur 1a terre (Eph. I, 9-10.).

Lorsque le Christ, Notre-Seigneur, entreprit d'exécuter l'ordre que lui avait donné son Père, il délivra le monde de sa décrépitude en imprimant aussitôt à toutes choses comme une nouvelle forme et une nouvelle beauté. Il guérit les blessures que le péché de notre premier père avait faites à la nature humaine. Il remit en grâce avec Dieu l'homme qui, par nature, était enfant de la colère. Il amena à la lumière de la vérité les esprits fatigués par de longues erreurs. Il fit renaître à toutes les vertus ceux qui étaient usés par toutes les impuretés. Ayant rendu aux hommes l'héritage de la béatitude éternelle, il leur donna, l'espérance certaine que leur corps mortel et périssable participerait un jour à l'immortalité et à la gloire céleste.

Pour rendre de si remarquables bienfaits aussi durables que l'humanité, il constitua enfin l'Eglise dépositaire de son pouvoir. Il la chargea, en prévision de l'avenir, de rétablir l'ordre dans la société humaine là où il serait troublé, de relever ce qui viendrait à tomber en ruine.

Cette restauration divine, dont Nous avons parlé, concerne principalement et directement les hommes établis dans l'ordre surnaturel de la grâce. Cependant les résultats précieux et salutaires qui en découlent se sont fait largement sentir même dans l'ordre naturel. Il en est résulté, tant pour la société universelle du genre humain que pour l'individu en particulier, un grand perfectionnement sous tous rapports.

L'ordre chrétien des choses une fois fondé eut pour l'homme cet heureux résultat que chacun apprit et s'accoutuma à se reposer sur la providence paternelle de Dieu, et à espérer les secours célestes avec la certitude de n'être pas trompé. De là sont nées la force, la modération, la constance, l'égalité d'âme provenant de la paix, enfin un grand nombre de vertus éclatantes et d'œuvres excellentes.

Quant à la société familiale et à la société civile, il est étonnant de voir à quel point elles ont gagné en dignité, en stabilité, en honneur. L'autorité des princes devint plus équitable et plus sainte, l'obéissance des peuples plus volontaire et plus facile, l'union des citoyens plus étroite, le droit de propriété plus garanti. Bref la religion chrétienne veilla et pourvut à toutes les choses qui sont considérées comme utiles dans l’État. Ainsi, selon le mot de saint Augustin, elle n'aurait pas, semble-t-il, pu rendre la vie plus tranquille et plus heureuse, lors même qu'elle aurait été établie dans le but unique de procurer et de multiplier les avantages et les bienfaits de la vie présente.

Mais notre intention n'est pas d'énumérer tout ce qui a été fait en ce genre. Nous voulons seulement parler de la société familiale, dont le mariage est le principe et le fondement.

(...)

 

Encyclique Arcanum Divinae sur le mariage chrétien

 

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02/10/2015

Léon XIII et le rosaire

leoxiii.jpgLe pape Léon XIII est connu pour son développement de la doctrine sociale de l’Eglise mais peu de personnes se souviennent encore qu’il fut appelé autrefois le pape du Rosaire. Dans une époque « où tous les maux s’accumulaient pour opprimer l’Eglise sous leur poids »  Léon XIII conçoit le projet de recourir à l’instrument qui de par le passé a déjà fait ses preuves. Il décide de recommander à nouveau le Rosaire de saint Dominique et de saint Pie V.

C’est pourquoi dans son encyclique du 1er septembre 1883 [Supremi Apostolus Officio, NdEspN] « il décrète et ordonne que dans tout le monde catholique la fête prochaine de Notre Dame du Rosaire sera célébrée avec une piété toute spéciale et avec toutes les solennités du culte : du 1er octobre au 2 novembre suivant on récitera pieusement  cinq dizaines au moins du Rosaire, suivies des Litanies de Lorette, dans toutes les églises paroissiales ».  Dans un bref du 24 décembre 1883, le Saint Père exprime sa joie que le peuple catholique eût partout si bien obéi à ses ordres. Il demandait de persévérer dans cette pratique. Le 30 août 1884 il renouvelait pour le mois d’octobre les prescriptions de l’année précédente. « Puisque l’acharnement des ennemis du christianisme est si grand, la constance et l’énergie des défenseurs ne doivent pas être moins vives… » Et le 20 août 1885 un décret de la Sacré Congrégation des Rites ordonna de continuer ainsi chaque année « tant que durera ce triste état de choses pour l’Eglise et pour les affaires publiques. » Lors de l’indiction du jubilé extraordinaire de 1886 le pape décide de placer ce jubilé sous le patronage de Notre Dame du Rosaire. L’année jubilaire n’était pas achevée, et les exercices du mois du Rosaire se poursuivaient encore, que le pape écrit le 26 octobre 1886 au cardinal Parocchi, son vicaire pour la ville de Rome, afin qu’il fasse poursuivre la récitation quotidienne du Rosaire dans les paroisses de Rome.

 

leonxiii.jpgLe 15 août 1889, dans une encyclique cette fois [Quamquam Pluries, NdEspN], le pape inculquait de nouveau, contre la puissance de Satan, le recours aux pouvoirs célestes par des prières incessantes. Et après avoir admirablement mis en valeur les titres de Saint Joseph au patronage de l’Eglise universelle, il demandait de le prier en même temps que Marie, durant le mois d’octobre. Et c’est pourquoi chaque jour de ce mois une prière à saint Joseph, composée par Léon XIII est récitée après le Rosaire devant le Saint Sacrement.

 

En somme depuis le 1er septembre 1883 où le pape avait établi par les faits l’efficacité merveilleuse de cette prière qu’est le Rosaire, il se contentera, sept fois de suite de recommander avec insistance sa récitation. Le 22 septembre 1891 il change de méthode et hausse le ton. Dans une encyclique [Octobri Mense, NdEspN] il considère le Rosaire en lui-même. Magistralement il analyse cette dévotion à Marie et révèle le secret de sa valeur incomparable. Il montre comment Marie est médiatrice dans l’ordre du salut. Il faut donc lui adresser nos prières avec confiance et entre toutes les méthodes de la prier, le Rosaire est préférable. C’est un si merveilleux composé de méditations et de prières vocales qu’on ne peut rien imaginer de plus agréable à la Vierge et de plus salutaire à nos âmes.

leon-xiii.jpgPlusieurs années de suite, à l’approche du mois d’octobre continueront de paraître de grandes encycliques sur le Rosaire. Celle du 7 septembre 1892 [Magnae Dei Matris, NdEspN] poursuivait dans une première partie l’enseignement de la précédente, mais ensuite cette encyclique développait l’idée du Rosaire comme remède à la corruption du monde, parce qu’il est un moyen facile de faire pénétrer dans les esprits les dogmes principaux de la foi chrétienne.

Toutes ses encycliques sur le Rosaire développeront cette ligne directrice, seule celle de 1895 [Adiutricem, NdEspN] part sur un autre aspect du Rosaire, celui du moyen de réaliser l’union des âmes.

Léon XIII écrivit sa dernière encyclique sur le Rosaire en 1898 [Diuturni Temporis, NdEspN], encyclique dans laquelle il annonça qu’il allait couronner son œuvre par un suprême document en publiant une constitution relative aux droits et privilèges dont jouissent les confréries du Rosaire. Cette constitution apostolique du 2 octobre 1898 fut suivie le 30 août 1899 du catalogue officiel des indulgences du Rosaire. Son œuvre mariale achevée Léon XIII rendit son âme à Dieu le 20 juillet 1903.

Source : Spiritualité - Année du Rosaire

> La liste des encycliques de Léon XIII sur le site du Vatican

29/10/2014

Jean-Paul II: "La règle enseignée par l'Église n'est pas un idéal"

Jean-Paul II, Pape, Veritatis SplendorExtrait de l'encyclique Veritatis Splendor

103. L'espace spirituel de l'espérance est toujours ouvert pour l'homme, avec l'aide de la grâce divine et avec la coopération de la liberté humaine.

C'est dans la Croix salvifique de Jésus, dans le don de l'Esprit Saint, dans les sacrements qui naissent du côté transpercé du Rédempteur (cf. Jn 19, 34) que le croyant trouve la grâce et la force de toujours observer la Loi sainte de Dieu, même au milieu des plus graves difficultés. Comme le dit saint André de Crète : « En vivifiant la Loi par la grâce, Dieu a mis la loi au service de la grâce, dans un accord harmonieux et fécond, sans mêler à l'une ce qui appartient à l'autre, mais en transformant de manière vraiment divine ce qui était pénible, asservissant et insupportable, pour le rendre léger et libérateur »

Les possibilités « concrètes » de l'homme ne se trouvent que dans le mystère de la Rédemption du Christ. Ce serait une très grave erreur que d'en conclure que la règle enseignée par l’Église est en elle même seulement un "idéal" qui doit ensuite être adapté, proportionné, gradué, en fonction, dit-on, des possibilités concrètes de l'homme, selon un "équilibrage des divers biens en question". Mais quelles sont les "possibilités concrètes de l'homme" ? Et de quel homme parle-t-on ? De l'homme dominé par la concupiscence ou bien de l'homme racheté par le Christ ? Car c'est de cela qu'il s'agit : de la réalité de la Rédemption par le Christ. Le Christ nous a rachetés ! Cela signifie : il nous a donné la possibilité de réaliser l'entière vérité de notre être ; il a libéré notre liberté de la domination de la concupiscence. Et si l'homme racheté pèche encore, cela est dû non pas à l'imperfection de l'acte rédempteur du Christ, mais à la volonté de l'homme de se soustraire à la grâce qui vient de cet acte. Le commandement de Dieu est certainement proportionné aux capacités de l'homme, mais aux capacités de l'homme auquel est donné l'Esprit Saint, de l'homme qui, s'il est tombé dans le péché, peut toujours obtenir le pardon et jouir de la présence de l'Esprit »

104. Dans ce contexte se situe une juste ouverture à la miséricorde de Dieu pour le péché de l'homme qui se convertit et à la compréhension envers la faiblesse humaine. Cette compréhension ne signifie jamais que l'on compromet ou que l'on fausse la mesure du bien et du mal pour l'adapter aux circonstances. Tandis qu'est humaine l'attitude de l'homme qui, ayant péché, reconnaît sa faiblesse et demande miséricorde pour sa faute, inacceptable est au contraire l'attitude de celui qui fait de sa faiblesse le critère de la vérité sur le bien, de manière à pouvoir se sentir justifié par lui seul, sans même avoir besoin de recourir à Dieu et à sa miséricorde. Cette dernière attitude corrompt la moralité de toute la société, parce qu'elle enseigne le doute sur l'objectivité de la loi morale en général et le refus du caractère absolu des interdits moraux portant sur des actes humains déterminés, et elle finit par confondre tous les jugements de valeur.

Pape Jean-Paul II, Lettre encyclique Veritatis Splendor du 6 août 1993

 

21/10/2014

Paul VI: À propos du langage pastoral dans l'Église catholique

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Extrait de l'Encyclique Mysterium Fidei, à propos du langage de l’Église

Il est donc logique pour nous de suivre comme une étoile le magistère de l’Église: le Divin Rédempteur a confié à sa garde et à son interprétation la parole de Dieu écrite ou transmise par tradition orale; nous sommes assurés que "même sans les recherches dont la raison est capable, même sans les explications que le langage peut fournir, ce que depuis l'antiquité l’Église entière proclame et croit selon la véritable foi catholique, cela reste toujours vrai".

Mais cela ne suffit pas. L'intégrité de la foi étant sauve, il faut de plus observer l'exactitude dans la façon de s'exprimer, de peur que l'emploi peu circonspect de certains termes ne suggère, ce qu'à Dieu ne plaise, des opinions fausses affectant la foi par laquelle nous connaissons les mystères les plus élevés. C'est le lieu de rappeler l'avertissement formulé par saint Augustin, à propos de la différence qui sépare, pour la manière de dire, les chrétiens des philosophes: "Les philosophes, dit-il, parlent en toute liberté, sans redouter de blesser l'auditeur religieux en des choses très difficiles à saisir. Mais nous sommes tenus de régler nos paroles sur une norme déterminée, pour éviter que la liberté d'expression ne donne lieu à telle opinion impie au plan même du sens des paroles".

Au prix d'un travail poursuivi au long des siècles, et non sans l'assistance de l'Esprit Saint, l’Église a fixé une règle de langage et l'a confirmée avec l'autorité des Conciles. Cette règle a souvent donné à l'orthodoxie de la foi son mot de passe et ses enseignes. Elle doit être religieusement respectée. Que personne ne s'arroge le droit de la changer à son gré ou sous couleur de nouveauté scientifique. Qui pourrait jamais tolérer un jugement d'après lequel les formules dogmatiques appliquées par les Conciles Œcuméniques aux mystères de la Sainte Trinité et de l'Incarnation ne seraient plus adaptées aux esprits de notre temps, et devraient témérairement être remplacées par d'autres ? De même on ne saurait tolérer qu'un particulier touche de sa propre autorité aux formules dont le Concile de Trente s'est servi pour proposer à la foi le mystère eucharistique. C'est que ces formules, comme les autres que l’Église adopte pour l'énoncé des dogmes de foi [notamment le sacrement du mariage, les commandements divins, le péché, et les fins dernières: la mort, le jugement, l'enfer et le paradis, NdEspN], expriment des concepts qui ne sont pas liés à une certaine forme de culture, ni à une phase déterminée du progrès scientifique, ni à telle ou telle école théologique; elles reprennent ce que l'esprit humain emprunte à la réalité par l'expérience universelle et nécessaire; et en même temps ces formules sont intelligibles pour les hommes de tous les temps et de tous les lieux. On peut assurément, comme cela se fait avec d'heureux résultats, donner de ces formules une explication plus claire et plus ouverte, mais ce sera toujours dans le même sens selon lequel elles ont été adoptées par l’Église: ainsi la vérité immuable de la foi restera intacte tandis que progressera l'intelligence de la foi. Car comme l'enseigne le premier Concile du Vatican, dans les dogmes sacrés "on doit toujours garder le sens que notre Mère la Sainte Église a déclaré une fois pour toutes et que jamais il n'est permis de s'en écarter sous le prétexte spécieux d'intelligence plus profonde".

Pape Paul VI, Encyclique Mysterium Fidei du 3 septembre 1965