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31/08/2015

La Vierge Marie Médiatrice

Beata_Vergine_Maria_della_Mercede_A.jpgLaisser passer la grâce de Dieu dans notre pauvreté, une joie ! Quelle joie de nous unir aux chrétiens de Belgique pour fêter « Marie médiatrice de grâce ». Nous n’hésitons pas à dire que nous recevons le don de Dieu les uns par les autres. Nous disons aussi que les frères les plus pauvres au milieu de nous sont des « canaux » privilégiés par lesquels nous arrive la grâce de Dieu. C’est une expérience concrète et quotidienne que nous faisons de la médiation de l’Amour de Dieu. Nous expérimentons cette « expérience » entre Dieu, le donateur de la grâce, et les pauvres pécheurs que nous sommes. Les pauvres ont là un rôle privilégié, par leur pauvreté même, ils sont comme des médiateurs, des moyens divins par lesquels la grâce de Dieu nous arrive.

Ainsi cette fête de la Vierge Marie que nous célébrons aujourd’hui, nous l’expérimentons chaque jour. Nous expérimentons aussi que, si nous refusons ces petits moyens par lesquels la grâce de Dieu nous est offerte, nous nous coupons de la grâce de Dieu. Cette fête nous révèle une autre expérience quotidienne. Imaginons que nous ayons un frère, tellement débordant dans son amour pour nous, qu’il nous « étouffe ». Est-ce que cet amour vient de Dieu ? Nous n’en savons rien. Ce que nous savons, c’est qu’il y a un malaise entre cet « enveloppement gênant » et ce que nous sommes prêts à recevoir. Nous avons l’expérience que « cet autre » peut nous gêner dans son amour. Les psychologues parleront de la « captation » pour s’attacher l’autre. Cela nous remet alors devant la source de l’amour et la pureté de cette Source.

Nous comprenons ainsi l’humilité de Dieu. Dieu est un amour tellement fort, grand et puissant que nous prenons l’image du soleil et nous sommes comme une petite goutte d’eau ! Approchez une petite goutte d’eau du soleil, c’est la « désintégration » de la petite goutte d’eau, à moins qu’elle ne soit rendue capable de vivre du Soleil. L’humilité de Dieu va jusqu’à proportionner le don de son amour en l’adaptant, par la médiation, à ce que nous pouvons en recevoir. Les pauvres sont toujours très humbles dans la manière avec laquelle ils nous proposent l’amour qui vient du cœur de Dieu. Toutes ces médiations trouvent leur origine dans l’unique médiateur Jésus. Tout vient de Dieu par Jésus.

L’Église dans sa sagesse, fait passer toutes les prières liturgiques qu’elle adresse au Père par Jésus Notre Seigneur, dans l’Esprit. Dieu, dans sa bonté miséricordieuse, vient nous rejoindre jusque dans notre misère. Il a voulu que la nature coopère, que la créature coopère au don de son amour. Quand Dieu veut nous combler de sa grâce, Il veut que nous la lui demandions, c’est la prière de demande. Il ne nous donne jamais sa grâce sans que nous la lui ayons demandée. Toute prière de demande dans l’Église, nous dispose à recevoir le don de Dieu. Ce don de Dieu nous déborde de toutes parts. Chaque fois que nous demandons notre pain quotidien, la joie dont nous avons besoin pour vivre, nous nous disposons, à recevoir la grâce de Dieu.

Dans sa miséricorde, Dieu veut que sa grâce nous arrive, proportionnée à ce que nous pouvons en recevoir. C’est sa grâce qui nous prépare à recevoir toutes ses grâces. Nous comprenons la fête que nous célébrons aujourd’hui en Église : Marie, médiatrice de toutes grâces est Immaculée. Elle demeure à la Source, c’est son privilège obtenu par la passion de Jésus. Étant toujours à la source, étant aussi de notre peuple, elle est solidaire de l’humanité, de chacun de nous. Elle nous donne Jésus, l’unique médiateur. Dans cet unique médiateur, sont contenus beaucoup de médiations.

Source : L'Evangile au quotidien

03/12/2014

Saint François Xavier par Paul Claudel

(poème dédié par P. Claudel, NdEspN) A Francis Jammes pour sa fête.Saint_Fran%C3%A7ois_Xavier_Versailles_1753_Joseph_Vien_Versailles_MV9044.jpg

Après Alexandre le Grand et ce Bacchus dont parle la poésie,
Voici François, le troisième, qui se met en route 
vers l'Asie, 
Sans phalange et sans éléphants, sans armes et 
sans armées, 
Et non plus roi dans le grand bond des chiens 
de guerre, et radieux, et couronné, 
Le plus haut parmi la haute paille de fer et le 
raisin d'Europe entre les doigts, 
Mais tout seul, et petit, et noir, et sale, et 
tenant fort la Croix ! 
Il s'est fait un grand silence sur la mer et le 
bateau vogue vers Satan. 
Déjà de ce seuil maudit il sort un souffle 
étouffant. 
Voici l'Enfer de toutes parts et ses peuples qui 
marchent sans bruit, 
Le Paradis de désespoir qui sent bon, et qui 
hurle et qui tape dans la nuit ! 
D'un côté l'Inde, et le Japon là-bas, et la Chine, 
et les grandes Iles putrides, 
L'Inde tendue vers en bas, fumante de bûchers 
et de pyramides, 
Dans le cri des animaux fossoyeurs et l'odeur 
de vache et de viande humaine, 
(Noire damnée dans ton bourreau convulsive 
fondue d'une soudure obscène, 
O secret de la torture et profondeur du blas- 
phème !) 
D'un côté les millions de l'Asie, l'hoirie du 
Prince de ce Monde, 
(Et le trois fois infâme Bouddha tout blanc 
sous la terre allongé comme un Ver immonde !) 
D'un côté l'Asie jusqu'au ciel et profonde 
jusqu'à l'Enfer ! 
(Il vient un souffle, il passe une risée sur la 
mer) — 
De l'autre ce bateau sur la mer un point noir ! 
et sur le pont 
Sans une pensée pour le port, sans un regard 
pour l'horizon, 
Un prêtre en gros bas troués à genoux devant 
le mât, 
Lisant l'Office du jour et la lettre de Loyola. 
Maintenant depuis Goa jusqu'à la Chine et 
depuis l'Ethiopie jusqu'au Japon, 
Il a ouvert la tranchée partout et tracé la 
circonvallation. 
Le diable n'est pas si large que Dieu, l'Enfer 
n'est pas si vaste que l'Amour, 
Et Jéricho après tout n'est pas si grande que 
l'on n'en fasse le tour. 
Il a reconnu tous les postes et levé l'enseigne 
obsidionale; 
Son corps pour l'éternité insulte à la porte 
principale. 
Il barre toutes les issues, il presse à toutes les 
entrées de Sodome ; 
L'immense Asie tout entière est cernée par ce 
petit homme. 
Plus pénétrant que la trompette et plus supé- 
rieur que le tonnerre, 
Il a cité la foule enfermée et proclamé la 
lumière. 
Voici la mort de la mort et l'arme au cœur de 
la Géhenne, 
La morsure au cœur de l'inerte Enfer pour qu'il 
crève et pourrisse sur lui-même !

François, capitaine de Dieu, a fini ses cara-
vanes ; 
Il n'a plus de souliers à ses pieds et sa chair est 
plus usée que sa soutane. 

Il a fait ce qu'on lui avait dit de faire, non 
point tout, mais ce qu'il a pu : 

Qu'on le couche sur la terre, car il n'en peut 
plus. 

Et c'est vrai que c'est la Chine qui est là, et 
c'est vrai qu'il n'est pas dedans : 

Mais puisqu'il ne peut pas y entrer, il meurt 
devant. 

II s'étend, pose à côté de lui son bréviaire, 

Dit : Jésus ! pardonne à ses ennemis, fait sa 
prière, 

Et tranquille comme un soldat, les pieds joints 
et le corps droit, 

Ferme austèrement les yeux et se couvre du 
signe de la Croix. 

Source: Claudel, P. Ecoute ma Fille. s.l, Gallimard. 1934. 119-122.