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16/04/2016

Tous les saints le confirment : beaucoup d'appelés et peu d'élus au Royaume de Dieu

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Image : Fra Angelico, Les précurseurs du Christ avec les saints et les martyrs, 1423-1424. Domaine public.

 

25/03/2016

Homélie de Saint Augustin : La Passion et les deux Larrons

ANALYSE. — 1. Paroles du larron au larron qui souffrait avec lui. — 2. Sa prière au Christ. — 3. Réponse du Christ. — 4. Comment le larron a été baptisé.

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1. Le Seigneur Jésus était attaché à la croix, les Juifs blasphémaient, les princes ricanaient, et bien que le sang des victimes tombées sous ses coups ne fût pas encore desséché, le larron lui rendait hommage ; d'autres secouaient la tête en disant : « Si tu es le Fils de Dieu, sauve-toi toi-même (Matth. XXVII, 10) ». Jésus ne répondait pas, et, tout en gardant le silence, il punissait les méchants. Pour la honte des Juifs, le Sauveur ouvre la bouche à un homme qui doit plaider sa cause ; cet homme n'est autre qu'un larron crucifié comme lui ; car deux larrons avaient été crucifiés avec lui, l'un à sa droite, l'autre à sa gauche. Au milieu d'eux se trouvait le Sauveur. C'était comme une balance parfaitement équilibrée, dont un plateau élevait le larron fidèle, dont l'autre abaissait le larron incrédule qui l'insultait à sa gauche. Celui de droite s'humilie profondément : il se reconnaît coupable au tribunal de sa conscience, il devient, sur la croix, son propre juge, et sa confession fait de lui un docteur. Voici sa première parole, elle s'adresse à l'autre brigand : « Ni toi, non plus, tu ne crains pas (Luc, XXI, I, 3) ! » Hé quoi, larron ? tout à l'heure tu volais, et maintenant tu reconnais Dieu; tout à l'heure tu étais un assassin, et maintenant tu crois au Christ ! Dis-nous donc, oui, dis-nous ce que tu as fait de mal ; dis-nous ce que tu as vu faire de bien au Sauveur. Nous, nous avons tué des vivants, et, lui, il a rendu la vie aux morts; nous, nous avons dérobé le bien d'autrui, et, lui, il a donné tous ses trésors à l'univers ; et il s'est fait pauvre pour me rendre riche. — Il discute avec l'autre larron : Jusqu'ici, dit-il, nous avons marché ensemble pour commettre le crime. Offre ta croix, on t’indiquera le chemin à suivre, si tu veux vivre avec moi. Après avoir été mon collègue dans la voie du crime, accompagne-moi jusqu'au séjour de la vie; car cette croix, c'est l'arbre de vie. David a dit en l'un de ses psaumes : « Dieu connaît les sentiers du juste, et la voie de l'impie conduit à la mort (Ps. I, 6) ».

2. Après sa confession, il se tourne vers Jésus : « Seigneur », lui dit-il, « souvenez-vous de moi, lorsque vous serez arrivé en votre royaume (Id. XXIII, 42.) ». Je ne savais comment dire au larron : Pour que le Christ se souvienne de toi, quel bien as-tu fait ? A quelles bonnes œuvres as-tu employé ton temps ? Tu n'as fait que du mal aux autres, tu as versé le sang de ton prochain, et tu oses dire « Souvenez-vous de moi ! » Larron, tu es devenu le compagnon de ton Maître, réponds donc : J'ai reconnu mon Maître, au milieu des ignominies de mon supplice ; aussi ai-je le droit d'attendre de lui une récompense. Qu'il soit cloué à une croix, peu m'importe ! je n'en crois pas moins que sa demeure, que le trône de sa justice est dans le ciel. « Seigneur », dit-il, « souvenez-vous de moi, lorsque vous serez arrivé en votre royaume». Le Christ n'avait ouvert la bouche ni en présence de Pilate, ni devant les princes des prêtres : de ses lèvres si pures n'était tombé aucun mot de réponse à l'adresse de ses ennemis, parce que leurs questions n'étaient pas dictées par la droiture. Et voilà qu'il parle au larron sans se faire attendre, parce que celui-ci le prie avec simplicité : « En vérité, en vérité, je te le dis : aujourd'hui même tu seras avec moi dans le paradis (Luc, XXIII, 13 . ) ». Hé quoi, larron ? tu as demandé une faveur pour l'avenir, et tu l'as obtenue pour le jour même ! Tu dis : « Lorsque vous arriverez en votre royaume », et, pas plus tard qu'aujourd'hui , il te donne une place au paradis !

4. Mais comment expliquer ceci ? Le Christ promet la vie au larron, et le larron n'a pas encore reçu la grâce ? Le Seigneur dit en son saint Evangile : « Quiconque ne renaît pas de l'eau et de l'Esprit-Saint ne peut entrer dans le royaume des cieux (Jean, III, 5.) ». Et le temps ne permet pas de baptiser le larron. Dans sa miséricorde, le Rédempteur imagine à cela un remède. Un soldat s'approche ; d'un coup de lance, il ouvre le côté du Christ, et de cette plaie «s'échappent du sang et de l'eau (Id. XIX, 31.) » qui rejaillissent sur les membres du larron. L'apôtre Paul a dit ceci : « Vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de l'aspersion de ce sang qui parle plus haut que celui d'Abel (Hébr. XII, 22-24. ) ». Pourquoi le sang du Christ parle-t-il plus haut que celui d'Abel ? Parce que le sang d'Abel accuse un parricide, tandis que celui du Christ innocente l'homicide et accorde, pour les siècles des siècles, le pardon à ceux qui se repentent. Ainsi soit-il.

Source : Sermon LII : Sur la Passion du Seigneur et les deux Larrons

24/03/2016

Saint Bernard : Sermon pour le Jeudi Saint

[...] « celui qui sort du bain n'a besoin que de se laver les pieds (Ibid. 1,0). » Effectivement, celui qui n'a plus de péchés mortels, est comme s'il sortait, du bain, sa tête, c'est-à-dire ses intentions, et ses mains, c'est-à-dire ses oeuvres, et sa vie tout entière, sont pures; mais ses pieds, qui sont les affections de l'âme, tant que nous marchons sur la poussière de cette vie, ne peuvent pas être complètement exempts de toute souillure; il est impossible que l'esprit ne se laisse pas quelquefois aller au moins à de fugitifs sentiments de vanité, de sensualité ou de curiosité, un peu plus qu'il ne faut; car, « nous faisons tous beaucoup de fautes (Jac. III, 2). »

5. Toutefois, que nul de nous ne méprise, ne regarde comme peu de chose ces sortes de fautes, car il est impossible d'être sauvé avec ces péchés-là, impossible même de les effacer, sinon par Jésus-Christ et en vertu de ses mérites. Non, je le répète, que nul, parmi, nous, ne s'endorme dans une fâcheuse sécurité, et ne se laisse aller à des paroles de malice, en cherchant à s'excuser de ces sortes de fautes (Psal. CXL, 4); car, comme il a été dit à saint Pierre par le Sauveur en personne, s'il ne les lave lui-même, nous n'aurons point de part avec lui. Toutefois, il ne faut pas non plus que nous nous en préoccupions à l'excès, car il nous est facile d'en obtenir le pardon de Dieu, qui ne demande pas mieux que de nous l'accorder; il suffit pour cela que nous les reconnaissions. Dans ces sortes de fautes qui sont à peu près inévitables, si la négligence à la prévenir est coupable, la crainte excessive d'y tomber est un mal. Aussi, dans la prière qu'il nous a enseignée, a-t-il voulu que nous priions tous les jours pour obtenir le pardon de ces fautes quotidiennes (Luc. XI, 4). En parlant de la concupiscence, nous avons dit que si le Sauveur nous a arrachés à la damnation, attendu que, selon l'Apôtre, « il n'y a plus maintenant de damnation à craindre pour ceux qui sont en Jésus-Christ (Rom. VIII, 1), » cependant il l'a laissée vivre dans nos coeurs pour nous humilier, nous affliger, nous apprendre tout ce que nous procure la grâce, et nous forcer à recourir à lui. Il en est de même de ces fautes légères : s'il n'a pas voulu, par un secret dessein de sa bonté, nous en délivrer entièrement, c'est afin de nous apprendre que, si nous sommes incapables, par nos propres forces, de nous soustraire entièrement même à ces petits péchés, à plus forte raison ne saurions-nous de nous-mêmes éviter ceux qui sont plus grands, et qu'ainsi nous craignions constamment de perdre sa grâce, en voyant qu'elle nous est si nécessaire, et nous nous tenions sans cesse sur nos gardes contre un pareil malheur.

Source : Saint Bernard : Sermon pour le Jeudi Saint

22/03/2016

Saint Augustin : vers la fin du Carême, le chemin du ciel

Le Christ Notre-Seigneur nous exauce avec son Père; pour nous cependant il a daigné prier son Père. Est-il rien de plus sûr que notre bonheur, quand il est demandé par Celui qui le donne? Car Jésus-Christ est en même temps Dieu et homme; il prie comme homme, et comme Dieu il donne ce qu'il demande. S'il attribue au Père tout ce que vous; devez conserver de lui, c'est que le Père ne procède pas de lui, mais lui du Père. Il rapporte tout à la source dont il émane, quoique en émanant d'elle il soit source aussi, puisqu'il est la source de la vie. C'est donc une source produite par une source. Oui, le Père qui est une source produit une source; mais il en est de ces deux sources comme du Père et du Fils qui ne sont qu'un seul Dieu. Le Père toutefois n'est pas le Fils, le Fils n'est pas le Père et l'Esprit du Père et du Fils n'est ni le Père ni le Fils; mais le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne sont qu'un seul Dieu. Appuyez-vous sur cette unité pour ne pas tomber en désunissant.

Cranach l'Ancien La trinité.JPGVous avez vu ce que demandait le Sauveur, ou plutôt ce qu'il voulait. Il disait donc : « Je veux, mon Père, que là où je suis soient aussi ceux que vous m'avez donnés ». Oui, « je veux que là où je suis ils soient aussi avec moi ». Oh ! l'heureux séjour ! Oh ! l'inattaquable patrie ! Elle n'a ni ennemi ni épidémie à redouter. Nous y vivrons tranquilles, sans chercher à en sortir; nous ne trouverions point de plus sûr asile. Sur quelque lieu que se fixe ton choix ici-bas, sur la terre, c'est pour craindre, ce n'est point pour y être en sûreté. Ainsi donc, pendant que tu occupes cette résidence du mal, en d'autres termes, pendant que tu es dans ce siècle, dans cette vie pleine de tentations, de morts, de gémissements et de terreurs, dans ce monde réellement mauvais, fais choix d'une autre contrée pour y porter ton domicile. Mais tu ne saurais le transporter au séjour du bien, si tu n'as fait du bien dans ce pays du mal. Quelle résidence que cette autre où personne ne souffre de la faim? Mais pour habiter cette heureuse patrie où la faim est inconnue; dans la patrie malheureuse où nous sommes partage ton pain avec celui qui a faim. Là nul n'est étranger, chacun est dans son pays. Veux-tu donc habiter ce séjour heureux où il n'y a point d'étranger? dans ce séjour malheureux ouvre ta porte à celui qui est sans asile. Donne l'hospitalité, dans ce pays du malheur, à l'étranger, afin d'être admis toi-même sur la terre fortunée où tu ne pourras la recevoir. Sur cette terre bénie, personne n'est sans vêtement, il n'y a ni froid ni chaleur excessifs; à quoi bon des habitations et des vêtements. Au lieu d'habitation on y trouve la protection divine; on y trouve l'abri dont il est dit : « Je me réfugierai à l'ombre de vos ailes (Ps. LVI, 2.) ». Ici donc reçois dans ta demeure celui qui n'en a pas, et tu pourras parvenir au lieu fortuné où tu trouveras un abri qu'il ne te faudra point restaurer, attendu que la pluie ne saurait le détériorer. Là jaillit perpétuellement la fontaine de vérité; eau féconde qui répand la joie et non l'humidité, source de véritable vie. Que voir en effet dans ces mots : « En vous est la fontaine de vie (Ps. XXXV,10.) »; sinon ceux-ci : « Le Verbe était en Dieu (Jean, I, 14.)? »

Ainsi donc, mes bien-aimés, faites le bien dans ce séjour du mal, afin de parvenir au séjour heureux dont nous parle en ces termes Celui qui nous le prépare : «Je veux que là où je suis ils soient aussi avec moi». Il est monté pour nous le préparer, afin que le trouvant prêt nous y entrions sans crainte. C'est lui qui l'a préparé; demeurez donc en lui. Le Christ serait-il pour toi une demeure trop étroite? Craindrais-tu encore sa passion? Mais il est ressuscité d'entre les morts, et il ne meurt plus, et la mort n'aura plus sur lui d'empire (Rom. VI, 9.). Ce siècle est à la fois le séjour et le temps du mal. Faisons le bien dans ce séjour du mal, conduisons-nous bien dans ce temps du mal; ce séjour et ce temps passeront pour faire place à l'éternelle habitation et aux jours éternels du bien, lesquels ne seront qu'un seul jour. Pourquoi disons-nous ici des jours mauvais ? Parce que l'un passe pour être remplacé par un autre. Aujourd'hui passe pour être remplacé par demain, comme hier a passé pour être remplacé par aujourd'hui. Mais où rien ne passe on ne compte qu'un jour. Ce jour est aussi et le Christ et son Père, avec cette distinction que le Père est un jour qui ne vient d'aucun jour, tandis que le Fils est un jour venu d'un jour.

Ainsi donc Jésus-Christ Notre-Seigneur, par sa passion, nous prêche les fatigues et les accablements de ce siècle; il nous prêche, par sa résurrection, la vie éternelle et bienheureuse du siècle futur. Souffrons le présent,, ayons confiance dans l'avenir. Aussi le temps; actuel que nous passons dans le jeûne et dans des observances propres à nous inspirer la contrition, est-il l'emblème des fatigues du siècle présent; comme les jours qui se préparent sont l'emblème du siècle futur, où nous ne sommes pas encore. Hélas ! oui, ils en sont l'emblème, car nous ne le tenons pas. La tristesse doit durer en effet jusqu'à la passion; après la résurrection, les chants de louanges.

Source : Sermon CCXVII. Vers la fin du Carême, le chemin du ciel.

21/03/2016

Homélie de Saint Jean Chrysostome sur la "Grande Semaine" (II)

4. Ce qui s'est passé pendant la nuit, afin que l'affaire ne fît pas de bruit, ne causât aucune espèce de tumulte; car, les apôtres ne faisaient rien pour s'étaler en spectacle, ni pour acquérir de la gloire. Donc, le geôlier se jeta à ses pieds. Eh bien, que fait Paul ? Avez-vous bien compris le miracle? Avez-vous bien compris ce qu'il y a là d'étonnant, d'étrange? Considérez maintenant la sollicitude, considérez la bonté de Paul. « Il lui cria : Ne vous faites point de mal, car nous sommes tous ici. » (Act. XXI, 28.) Le geôlier l'avait enchaîné cruellement; l'Apôtre ne le laissa pas mourir d'une manière cruelle; il oublia son injure : « Nous sommes tous ici, » dit-il. Voyez la modestie ! il ne dit pas : ces choses merveilleuses, c'est aloi qui les ai faites; mais, que dit-il ? « Nous sommes tous ici. » Il se compte au nombre des prisonniers, notre Paul. Le geôlier, à cette vue, fut saisi d'admiration; le miracle le frappa de stupeur; il bénit Dieu, c'était une âme vraiment digne de la sollicitude et de la bonté de l'Apôtre, que ce geôlier; il ne considéra pas ce qui s'était passé, comme un prestige. Et pourquoi ne crut-il pas à un prestige? C'est qu'il les entendit chantant des hymnes au Seigneur; et un faiseur de prestiges ne chante jamais d'hymne au Seigneur. Il avait reçu beaucoup de faiseurs de prestiges en sa qualité de geôlier; mais jamais aucun d'eux n'avait fait chose pareille, n'avait fait tomber des liens, ni montré la même sollicitude. C'est que Paul voulait être enchaîné, et il ne prit pas la fuite, ne voulant pas causer la mort du geôlier.
Roi des Juifs.jpgCet homme s'était élancé, tenant dans ses mains un glaive et un flambeau; le démon voulait lui faire commettre un meurtre, pour prévenir sa conversion. Mais la voix retentissante de Paul conquit bien vite le salut de son âme; car, non-seulement il cria, ruais il lui dit d'une voix retentissante : « Nous sommes tous ici. » Le geôlier admira cette sollicitude, et celui qui n'était pas enchaîné, tomba aux pieds de celui qui était chargé de chaînes ; et que lui dit-il? « Seigneur, que faut-il que je fasse pour être sauvé? » (Act. XVI, 30.) Comment! c'est toi qui l'as enchaîné, et c'est toi qui te trouves dans l'embarras ? C'est toi qui lui as mis ses pieds dans une entrave de bois, et voilà que tu cherches la manière de te convertir et de te sauver? Voyez-vous la ferveur? voyez-vous le zèle empressé ? Pour cet homme, pas de délai; libre de crainte il ne se croit pas libre à l'égard de son bienfaiteur, mais tout de suite, il s'élance, il se jette sur le salut de son âme. C'était le milieu de la nuit; il ne dit pas : délibérons, laissons venir le jour, mais, tout de suite, il court à son salut. Cet homme est grand, se dit-il; il surpasse la nature humaine; j'ai vu la merveille qu'il a faite; j'ai admiré sa sollicitude pour moi; il a souffert, de moi, des maux sans nombre; exposé aux derniers malheurs, et me tenant dans ses mains, moi qui l'ai enchaîné, il peut me tuer; et, non-seulement il n'en fait rien, mais, au moment où je m'apprête à m'égorger moi-même, ou déjà je me perce de mon glaive, c'est lui qui m'arrête. Ce geôlier a eu raison de dire : « Seigneur, que faut-il que je fasse pour être sauvé? » Car, ce n'étaient pas seulement les miracles qui attiraient auprès des apôtres de nouveaux croyants, mais, avant leurs miracles, leur vie opérait sur les hommes. Voilà pourquoi l'Écriture dit : « Que votre lumière luise devant les hommes, afin qu'ils « voient vos bonnes oeuvres, et qu'ils glorifient votre Père, qui est dans les cieux. » (Matth. V, 16.)
Avez-vous bien vu la ferveur du geôlier? Voyez maintenant la ferveur de Paul; il ne diffère pas; son zèle ne se ralentit pas; il est dans les fers, chargé d'entraves, couvert de blessures, et vite il l'instruit des mystères, et il instruit, avec lui, toute sa famille, et, après l'ablution spirituelle, après la table spirituelle, il lui sert aussi les aliments de la chair (Confusion : ce n'est pas Paul qui offre des aliments au geôlier, c'est le geôlier qui convie Paul à en prendre chez lui (Act. XVI, 34.)). Mais pourquoi a-t-il fait trembler la prison? pour réveiller l'âme du geôlier par le spectacle de ce qui arrivait. Il a fait tomber les liens sensibles de ceux qui étaient enchaînés avec lui, pour faire tomber les liens spirituels du geôlier. Le Christ a fait tout le contraire : Un homme s'approcha de lui, qui souffrait d'une double paralysie; de la paralysie du péché, de la paralysie du corps. Le Christ guérit d'abord la paralysie du péché, par ces paroles : « Mon fils, vos péchés vous sont remis. » (Marc, II, 5.) Et, comme on disputait sur ces paroles ; comme on blasphémait; comme on disait : « Personne ne peut remettre les péchés, que Dieu seul (Ibid. 7) ; » le Christ, voulant montrer qu'il est véritablement Dieu, voulant aussi se ménager les moyens de luger ses contradicteurs d'après leur propre bouche, afin de pouvoir dire : « Je vous juge d'après votre propre bouche (Luc, XIX, 22), » c'est toi-même qui viens de dire, que nul ne peut remettre les péchés que Dieu seul; eh bien ! voici, dit-il, que je remets les péchés, confesse donc ma divinité ; c'est, d'après ta manière de juger, que je porte moi-même la sentence. Nous voyons ici l'action spirituelle d'abord, et ensuite, l'action sensible. Paul nous montre ici le contraire, il fait tomber d'abord les liens sensibles, et ensuite les liens spirituels.
Avez-vous bien compris la force des hymnes, la puissance de la bénédiction, la puissance de la prière? Certes l'efficacité de la prière est toujours grande; mais, quand le jeûne se joint à la prière, c'est alors que l'âme est doublement puissante ; c'est alors que nous avons la tempérance dans les pensées; c'est alors que l'âme se réveille et contemple les choses d'en-haut. Aussi l'Ecriture joint-elle toujours le jeûne à la prière. Comment cela? Dans quel passage ? « Ne vous refusez point l'un à l'autre ce devoir, » dit l'Apôtre, « si ce n'est du consentement de l'un et de l'autre , afin d'être libres pour le jeûne et pour la prière.» (I Cor. VII, 5.) Et encore ailleurs : « Mais cette sorte de démon ne se chasse que par la prière et le jeûne. » (Matth. XXII, 20.) Et ailleurs encore : « Et après qu'ils eurent prié et jeûné, ils leur imposèrent les mains. » (Act. I, 33.)

5. Voyez-vous le jeûne partout uni à la prière ? C'est alors en effet qu'il s'échappe de la lyre une mélodie plus agréable, plus digne du Seigneur. Les cordes ne sont pas humides, relâchées par l'ivresse ; la raison est bien tendue ; l'intelligence, bien éveillée ; l'âme vigilante; c'est ainsi qu'il convient de s'approcher de Dieu, de s'entretenir avec lui, seul à seul. Si nous avons une affaire grave à communiquer à nos amis, nous les prenons à l'écart: à bien plus forte raison , faut-il se conduire de même avec Dieu, entrer, avec un calme parfait, dans la chambre où il se retire. Et nous obtiendrons absolument tout de lui, si nous lui demandons ce qui est utile. C'est un grand bien que la prière, quand elle part d'une âme reconnaissante et sage. Et maintenant, comment la prière montrera-t-elle notre reconnaissance? Si nous nous faisons une loi, non-seulement quand nous recevons, mais, de plus, quand nous ne sommes pas exaucés, de bénir le Seigneur. En effet, tantôt le Seigneur accorde, tantôt il n'accorde pis; mais, dans l'un et dans l'autre de ces deux cas, il agit utilement pour nous ; de sorte que, soit que vous receviez, soit que vous ne receviez pas, vous recevez cela même que vous n'avez pas reçu ; et si vous avez réussi , et si vous n'avez pas réussi, vous avez réussi en ne réussissant pas. C'est qu'en effet il y a des circonstances où il est plus utile pour nous de ne pas recevoir que de recevoir ; s'il n'était pas souvent de notre intérêt de ne pas recevoir , Dieu nous accorderait toujours; quand il est de notre intérêt de ne pas réussir, l’insuccès est un succès. Voilà pourquoi Dieu diffère souvent de nous accorder nos demandes; ce n'est pas pour nous faire languir ; quand il nous force à attendre le don, il nous exerce, et il fait bien, à l'assiduité dans la prière. Souvent nous recevons, et après avoir reçu, nous négligeons la prière; or Dieu , qui veut nous tenir constamment en éveil, diffère de nous accorder ce que nous désirons. C'est la conduite des bons pères, dont les enfants paresseux ne montrent d'ardeur que pour de puérils plaisirs ; les pères les retiennent auprès d'eux, en leur promettant un très-grand présent, et, pour les retenir, tantôt ils diffèrent, tantôt ils refusent absolument de donner. Il arrive aussi que nous voulons des choses nuisibles , et Dieu , qui comprend mieux que nous nos intérêts, n'écoute pas nos prières , aimant mieux nous procurer ce qui nous est utile, même à notre insu. Et qu'y a-t-il d'étonnant que nous ne soyons pas exaucés, quand la même chose est arrivée à Paul? Lui aussi souvent, n'a pas obtenu ce qu'il demandait, et, non-seulement il ne s'est pas affligé, mais encore il a rendu à Dieu des actions de grâces. « C'est pourquoi, » dit-il, « j'ai prié trois fois le Seigneur. » (II Cor. XII, 8. ) Cette expression « Trois fois » signifie souvent. Si Paul, après de fréquentes prières, n’a pas réussi , à bien plus forte raison nous convient-il, à nous, de persévérer. Mais voyons ce qu'il éprouvait, après avoir souvent demandé sans obtenir; non-seulement il ne s'affligeait pas, mais encore il se glorifiait de ce qu'il n'avait pas reçu. « J'ai prié trois fois le Seigneur, et il m'a répondu : Ma grâce vous suffit, car ma puissance éclate dans la faiblesse. » (II Cor. XII, 9. ) Et il continue: « Je prendrai donc plaisir à me glorifier de mes faiblesses.»

Passion de Notre Seigneur.jpg6. Comprenez-vous la reconnaissance, du serviteur? il demande à être affranchi de ses faiblesses ; Dieu ne lui accorde pas sa prière; et, non-seulement Paul ne s'afflige pas, mais il se glorifie de ses faiblesses. Faisons de même, nous aussi, disposons nos âmes de cette manière, et, que Dieu nous accorde ou ne nous accorde pas nos demandes, sachons dans les deux cas, le bénir, car, dans les deux cas, il agit selon nos intérêts. S'il a le pouvoir de donner, il s'ensuit qu'il a le pouvoir, et de donner, et de donner ce qu'il veut, et de ne pas donner. Vous ne connaissez pas vos intérêts aussi clairement que Dieu les tonnait; souvent vous demandez des choses nuisibles et funestes ; mais Dieu, plus jaloux que vous-mêmes de votre salut, ne regarde pas votre prière; avant votre prière, il regarde partout ce qui vous est utile. Si les pères selon la chair, n'accordent pas à leurs enfants tout ce qu'ils leur demandent, ce qui ne prouve pas qu'ils dédaignent leurs enfants, mais, au contraire, qu'ils ont pour eux la plus grande sollicitude, à bien plus forte raison, Dieu, qui nous aime davantage, qui connaît, mieux que personne, ce qui nous est utile, suit toujours la même conduite. Donc ne cessons pas de nous livrer à la prière, non-seulement pendant le jour, mais pendant la nuit. Ecoutez ce que dit le Prophète : « Je me levais au milieu de « la nuit, pour vous louer des jugements de « votre justice. » (Ps. CXVIII, 62.) Un roi, assiégé de tant de soucis, qui avait entre les mains le gouvernement de tant de peuples, de villes et de nations; qui avait à prendre soin de la paix, à terminer des guerres ; qui voyait toujours auprès de lui un tourbillon inexprimable d'affaires; qui n'avait pas le temps de respirer, non-seulement consacrait les jours, mais jusqu'aux nuits à la prière. Si un roi, fait pour mener une vie de délices, ayant tant de soucis, enveloppé dans tant d'affaires, ne trouvait pas de repos, même pendant la nuit, mais se livrait sans cesse à la prière, avec un soin plus scrupuleux que les moines des montagnes , quelle sera , répondez-moi , notre excuse, à nous, qui avons une liberté complète: qui nous sommes fait une vie indépendante, vide d'affaires, et qui non-seulement nous ensevelissons les nuits entières dans le sommeil, mais ne trouvons pas, même pendant le jour, des moments où notre âme s'éveille, pour la prière que nous devons au Seigneur? C'est une grande arme due la prière, c'est une belle parure que la prière, et une sûreté, et un port, et un trésor de biens, et une richesse que rien ne peut ravir. Quand nous avons besoin des hommes, nous avons besoin de faire des dépenses, et d'employer des flatteries serviles; et d'aller, et de venir, et de prendre beaucoup de peines et de soins ; car souvent nous ne pouvons pas nous adresser directement à ceux de qui dépend ce que nous demandons. Il faut d'abord aller trouver les ministres, les dispensateurs des grâces, et ceux qui sont chargés de répondre pour les hommes puissants ; et il faut, avec de l'argent, avec des paroles, par tous les moyens possibles, les adoucir, afin d'obtenir, par leur entremise, ce que nous demandons. Au contraire, avec Dieu, il n'en est pas de même; en le priant par les autres, nous obtenons moins vite ses faveurs qu'en les lui demandant nous-mêmes. Et, avec Dieu, celui qui reçoit, et celui qui ne reçoit pas, profitent; avec les hommes, au contraire, dans les deux cas, souvent, nous avons à nous plaindre. Eh bien ! donc, puisqu'il y a plus d'avantage, et plus de facilité, à s'approcher de Dieu, ne méprisons pas la prière. Voulez-vous trouver Dieu plus propice ? voulez-vous obtenir plus facilement ce que vous désirez ? invoquez-le vous-mêmes, avec la pureté des intentions, avec la sagesse de l'âme; ne le priez pas, par acquit de conscience, ce que font beaucoup de personnes, dont la langue prononce les paroles de la prière; dont la pensée , en même temps, reste souvent dans leur maison, ou se promène sur la place publique, à travers les rues, ce qui est un artifice du démon ; car, comme il sait qu’au moment de la prière, nous pouvons obtenir le pardon de nos péchés, jaloux de nous fermer ce port, il s'élève alors contre nous; il chasse notre pensée loin des paroles que nous prononçons, afin qu'au sortir de l'église , nous en retirions plus de perte que de profit.
Pénètre-toi, ô homme, de ces vérités, et, quand tu t'approches de Dieu, songe auprès de qui tu t'approches ; et il suffit, pour tenir ton esprit éveillé, de croire en Celui qui te donne ce que tu demandes; lève les yeux au ciel, et pense à qui ton discours s'adresse. Quand on parle à un homme, tant soit peu élevé aux honneurs de ce monde, le plus négligent s'excite de toutes manières, et se tient l'esprit en éveil; à bien pics forte raison, ferons-nous de même si nous pensons que nous nous adressons au Seigneur des anges; voilà qui suffira pour nous rendre attentifs. Voulez-vous un autre moyen, pour vous tirer de votre engourdissement? En voici un: souvent nous avons fait notre prière, et nous n'avons pas entendu un seul des mots que nous avons prononcés, et nous nous en allons; pensons à cela, et, tout de suite, reprenons notre prière. Et si la même distraction nous arrive deux fois, trois fois, quatre fois, reprenons autant de fois notre prière, et ne nous retirons pas avant de l'avoir dite tout entière d'un esprit bien attentif. Quand le démon comprendra que nous ne voulons pas nous retirer avant de l'avoir dite avec soin, avec un esprit constamment en éveil, il cessera de nous assaillir, puisqu'il verra que ces attaques ne servent qu'à nous forcer de recommencer souvent la même prière. Nous recevons tous les jours, mes bien-aimés, de nombreuses blessures, des gens de notre maison, des étrangers, sur la place, chez nous; de la part des hommes publics, de la part des particuliers; des voisins, des amis; à toutes ces blessures, appliquons les remèdes qui leur sont propres, la prière. Car Dieu, si nous le prions d'un esprit vigilant, d'une âme embrasée, d'un cœur ardent, peut nous accorder notre pardon, la rémission de toutes nos fautes. Puissions-nous l'obtenir tous, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

Source : Homélie sur la Grande Semaine

11/08/2015

Remèdes contre les tentations

 

Temptation-of-Jesus.jpg« Ces remèdes nous sont indiqués par les Saints et en particulier par Sainte Thérèse (Vie par elle-même, ch. 30-31).

1.  Le premier est une prière humble et confiante, pour mettre de notre côté Dieu et ses anges. Si Dieu est avec nous, qui sera contre nous ? Qui donc en effet peut être comparé à Dieu ?

Cette prière doit être humble ; car il n’est rien qui mette plus rapidement en fuite l’Ange rebelle qui, s’étant révolté par orgueil, n’a jamais su pratiquer cette vertu : s’humilier devant Dieu, reconnaître notre impuissance à triompher sans son secours, déconcerte les plans de l’Ange superbe. Elle doit être confiante : car la gloire de Dieu étant intéressée à notre triomphe, nous pouvons avoir pleine confiance en l’efficacité de sa grâce.

Il est bon aussi d’invoquer Saint Michel, qui, ayant infligé au démon une éclatante défaite, sera heureux de compléter sa victoire en nous et par nous. Notre Ange gardien le secondera volontiers, si nous nous confions en lui. Mais surtout nous n’oublierons pas de prier la Vierge immaculée qui de son pied virginal ne cesse d’écraser la tête du serpent, et est plus terrible au démon qu’une armée rangée en bataille.

2.  Le second moyen, c’est l’usage confiant des sacrements et des sacramentaux. La confession, étant un acte d’humilité, met en fuite le démon ; l’absolution qui la suit, nous applique les mérites de Jésus-Christ et nous rend invulnérables à ses traits ; la sainte communion, en mettant dans notre cœur Celui qui a vaincu Satan, lui inspire une véritable terreur.

Les sacramentaux eux-mêmes, le signe de la croix, ou les prières liturgiques faites avec esprit de foi, en union avec l’Église, sont aussi d’un précieux secours. Sainte Thérèse recommande particulièrement l’eau bénite, peut-être parce que c’est humiliant pour le démon de se voir ainsi déjoué par un moyen aussi simple que celui-là.

3.   Aussi le dernier moyen est un mépris souverain du démon. C’est encore Sainte Thérèse qui nous le dit :

« C’est très fréquemment que ces maudits me tourmentent ; mais ils m’inspirent fort peu de crainte ; car, je le vois très bien, ils ne peuvent bouger sans la permission de Dieu… Qu’on le sache bien, toutes les fois que nous les méprisons, ils perdent de leurs forces, et l’âme acquiert sur eux d’autant plus d’empire… Ils n’ont de force que contre les âmes lâches, qui leur rendent les armes ; mais contre celles-là, ils font montre de leur pouvoir. » (p. 405-406). Se voir mépriser par des êtres plus faibles est en effet une rude humiliation pour ces esprits superbes. Or, comme nous l’avons dit, appuyés humblement sur Dieu, nous avons le droit et le devoir de les mépriser : « Si Deus pro nobis, quis contra nos ? » Ils peuvent aboyer, ils ne peuvent nous mordre que si par imprudence ou par orgueil nous nous mettons en leur pouvoir.

Ainsi donc, la lutte que nous avons à soutenir contre le démon, aussi bien que contre le monde et la concupiscence, nous affermit dans la vie surnaturelle et nous permet même d’y progresser. »

 

Adolphe Tanquerey, Précis de théologie Ascétique et Mystique

 

Source: Les hommes adorateurs

26/02/2015

Notification sur le livre du P. Jacques Dupuis, S.J. - Congrégation pour la Doctrine de la Foi

 

CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI


NOTIFICATION
sur le livre du
P. JACQUES DUPUIS, S.J.,
«Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux»
Paris, Cerf 1997

 

Préambule

 

Après un examen de l’œuvre du P. Jacques Dupuis, S.J., Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux (Paris, 1997), la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a décidé d’en approfondir l’étude selon sa procédure ordinaire, telle qu’elle a été fixée par le chapitre III du Règlement pour l’examen des doctrines.

 

Il faut souligner tout d’abord que l’Auteur propose dans ce livre une réflexion introductive à une théologie chrétienne du pluralisme religieux. Il ne s’agit pas simplement d’une théologie des religions, mais d’une théologie du pluralisme religieux, qui veut rechercher, à la lumière de la foi chrétienne, la signification que revêt la pluralité des traditions religieuses à l’intérieur du dessein de Dieu sur l’humanité. Conscient du caractère problématique de sa perspective, l’Auteur lui-même ne se cache pas que les questions soulevées par son hypothèse pourraient être aussi nombreuses que les solutions qu’il propose.

 

A la suite de l’examen effectué et des résultats obtenus dans le dialogue avec l’Auteur, tenant compte également des analyses et des avis exprimés par les Consulteurs sur les Réponses données par celui-ci lors de la Session Ordinaire du 30 juin 1999, les Eminents Pères ont reconnu sa tentative de rester dans les limites de l’orthodoxie, tout en s’efforçant de traiter des problématiques inexplorées jusqu’ici. En même temps, tout en considérant la bonne disposition à fournir les éclaircissement jugés nécessaires manifestée dans ses réponses ainsi que sa volonté de rester fidèle à la doctrine de l’Eglise et à l’enseignement du Magistère, ils ont constaté que dans le livre sont contenues de graves ambiguïtés et des difficultés sur des points doctrinaux importants qui peuvent conduire le lecteur à des opinions erronées ou dangereuses. Ces points concernent l’interprétation de la médiation salvifique unique et universelle de Jésus Christ, l’unicité et la plénitude de la Révélation dans le Christ, l’action salvifique de l’Esprit Saint, l’ordination de tous les hommes à l’Eglise, la valeur et la signification de la fonction salvifique des religions.

 

La Congrégation pour la Doctrine de la Foi, après avoir accompli la procédure ordinaire de l’examen dans toutes ses phases, a décidé de rédiger une Notification[1] dans le but de sauvegarder la doctrine de la foi catholique d’erreurs, d’ambiguïtés ou d’interprétations dangereuses. Cette Notification, approuvée par le Saint Père durant l’audience du 24 novembre 2000, a été présentée au Père Jacques Dupuis et acceptée par lui.  En signant ce texte, l’Auteur s’est engagé à reconnaître les thèses énoncées et à s’en tenir à l’avenir, dans ses activités théologiques et ses publications aux contenus doctrinaux indiqués dans la Notification, dont le texte devra apparaître aussi dans les éventuelles réimpressions ou rééditions du livre en question ainsi que dans ses traductions.

 

La présente Notification n’entend pas exprimer un jugement sur la pensée subjective de l’Auteur; elle se propose plutôt d’énoncer la doctrine de l’Eglise à propos de certains aspects des vérités doctrinales énoncées ci-dessus. Elle voudrait, en même temps, réfuter les opinions erronées et dangereuses auxquelles le lecteur pourrait être conduit, indépendamment des intentions de l’Auteur, en raison des formulations ambiguës et des explications insuffisantes de différents passages du livre. Elle voudrait offrir ainsi aux lecteurs catholiques un critère d’évaluation sûr et conforme à la doctrine de l’Eglise, pour éviter que la lecture de l’ouvrage n’induise de graves équivoques et malentendus.

 

I. A propos de la médiation salvifique unique et universelle de Jésus-Christ

 

1. Il faut croire fermement que Jésus-Christ, Fils de Dieu fait homme, crucifié et ressuscité, est le médiateur unique et universel du salut de toute l’humanité.[2]

 

2. Il faut aussi croire fermement que le Jésus de Nazareth, Fils de Marie et seul Sauveur du monde est le Fils et le Verbe du Père.[3] En raison de l’unité du plan divin de salut, qui a son centre en Jésus-Christ, il faut tenir en outre que l’œuvre salvifique du Verbe est accomplie dans et par Jésus-Christ, Fils incarné du Père, en tant que médiateur du salut de toute l’humanité.[4] Il est donc contraire à la foi catholique non seulement d’affirmer une séparation entre le Verbe et Jésus ou une séparation entre l’action salvifique du Verbe et celle de Jésus, mais aussi de soutenir la thèse d’une action salvifique du Verbe comme tel, dans sa divinité, indépendamment de l’humanité du Verbe incarné.[5]

 

II. A propos de l’unicité et de la plénitude de la révélation de Jésus-Christ

 

3. Il faut croire fermement que Jésus-Christ est le médiateur, l’accomplissement et la plénitude de la révélation.[6] Il est donc contraire à la foi de l’Eglise de soutenir que la révélation par/en Jésus-Christ soit limitée incomplète ou imparfaite. En outre, même si on ne possédera la pleine connaissance de la vérité divine qu’au jour de la venue glorieuse du Seigneur, la révélation historique de Jésus-Christ offre tout ce qui est nécessaire pour le salut de l’homme et n’a pas besoin d’être complétée par d’autres religions.[7]

 

4. Il est conforme à la doctrine catholique d’affirmer que les grains de vérité et de bonté qui se trouvent dans les autres religions participent d’une certaine manière aux vérités contenues par/en Jésus-Christ.[8]Par contre, considérer que ces éléments de vérité et de bonté, ou certains d’entre eux, ne dérivent pas ultimement de la médiation-source de Jésus-Christ, est une opinion erronée.[9]

 

III. A propos de l’action salvifique universelle de l’Esprit Saint

 

5. La foi de l’Eglise enseigne que l’Esprit Saint, à l’œuvre après la résurrection de Jésus-Christ, est encore l’Esprit du Christ envoyé par le Père qui opère de manière salvifique aussi bien dans les chrétiens que dans les non-chrétiens.[10] Il est donc contraire à la foi catholique de considérer que l’action salvifique de l’Esprit Saint puisse s’étendre au-delà de l’unique économie salvifique universelle du Verbe incarné.[11]

 

IV. A propos de l’ordination de tous les hommes à l’Eglise

 

6. Il faut croire fermement que l’Eglise est signe et instrument de salut pour tous les hommes.[12] Il est contraire à la foi catholique de considérer les diverses religions du monde comme des voies complémentaires à l’Eglise pour ce qui est du salut.[13]

 

7. Selon la doctrine catholique, les adeptes des autres religions sont eux aussi ordonnés à l’Église et sont tous appelés à en faire partie.[14]

 

V. A propos de la valeur et de la fonction salvifique des traditions religieuses

 

8. Selon la doctrine catholique, il faut tenir que: «ce que l’Esprit fait dans le cœur des hommes et dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions, remplit une fonction de préparation évangélique (cf. Const. dogm. Lumen gentium, n. 16)».[15] Il est donc légitime de soutenir que l’Esprit Saint pour sauver les non-chrétiens, utilise aussi les éléments de vérité et de bonté qui se trouvent dans les diverses religions, mais considérer comme voies de salut ces religions, prises comme telles, n’a aucun fondement dans la théologie catholique; en effet, elles présentent des lacunes, des insuffisances et des erreurs[16] sur les vérités fondamentales regardant Dieu, l’homme et le monde.

 

En outre, le fait que les éléments de vérité et de bonté des différentes religions puissent préparer les peuples et les cultures à accueillir l’événement salvifique de Jésus-Christ, ne suppose pas que les textes sacrés des autres religions puissent être considérés comme complémentaires à l’Ancien Testament, qui est la préparation immédiate à l’événement du Christ.[17]

 

Au cours de l’audience du 19 janvier 2001, le Souverain Pontife Jean-Paul II, à la lumière des derniers développements, a confirmé son approbation de la présente Notification, décidée lors de la Session Ordinaire de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, et en a ordonné la publication.   

 

A Rome, au siège de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le 24 janvier 2001, jour de la mémoire de Saint François de Sales.

 

+ Joseph Card. Ratzinger
Préfet

  

+ Tarcisio Bertone, SDB
Archevêque émérite de Verceil
Secrétaire

 


 

[1]   En raison des tendances manifestées dans divers milieux et toujours plus présentes dans la pensée des fidèles eux-mêmes, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a publié la Déclaration “Dominus Jesus” sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Eglise [AAS, 92 (2000) 742-765] pour protéger le donné essentiel de la foi catholique. La Notification s’inspire des principes indiqués dans cette Déclaration pour évaluer l’oeuvre de J. Dupuis.

 

[2]  Cf. CONC. DE TRENTE, Décr. De peccato originali: Denz. n. 1513; Décr. De iustificatione: Denz. nn. 1522; 1523; 1529; 1530. Cf. aussi CONC. VATICAN II, Const. past. Gaudium et spes, n.10; Const. dogm. Lumen gentium, nn. 8; 14; 28; 49; 60. Jean-Paul II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 5: AAS 83 (1991) 249-340; Exhort. apostol. Ecclesia in Asia, n. 14: AAS 92 (2000) 449-528; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, nn. 13-15.

 

[3] Cf. CONC. DE NICEE I: Denz. n. 125; CONC. DE CHALCEDOINE: Denz. n. 301.

 

[4] Cf. CONC. DE TRENTE, Décr. De iustificatione: Denz. nn. 1529; 1530. Cf. aussi CONC. VATICAN II, Const. lit. Sacrosantum Concilium, n. 5; Const. past. Gaudium et spes, n. 22.

 

[5] Cf. JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 6; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 10.

 

[6] Cf. CONC. VATICAN II, Const. dogm. Dei Verbum, nn. 2; 4; JEAN-PAUL II, Lettre enc. Fides et ratio, nn. 14-15; 92, AAS 91 (1999) 5-88;CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 5.

 

[7] Cf.CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 6; Catéchisme de l’Eglise catholique, nn. 65-66.

 

[8] Cf. CONC. VATICAN II, Const. dogm. Lumen gentium, n.17; Décr. Ad gentes, n. 11; Décl. Nostra aetate, n. 2.

 

[9] Cf. CONC. VATICAN II, Const. dogm. Lumen gentium, n.16; JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 10.

 

[10] Cf. CONC. VATICAN II, Const. past. Gaudium et spes, n. 22; JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, nn. 28-29.

 

[11] Cf. JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 5; Exhort. apostol. Ecclesia in Asia, nn. 15-16; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 12.

 

[12] Cf. CONC. VATICAN II, Const. dogm. Lumen gentium, nn. 9; 14; 17; 48; JEAN-PAUL II, Redemptoris missio, n. 11; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 16. 

 

[13] Cf. JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 36; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, nn. 21-22.

 

[14] Cf. CONC. VATICAN II, Const. dogm. Lumen gentium, nn. 13 et 16; Décr. Ad gentes, n. 7; Décl. Dignitatis humanae, n. 1; JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 10; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, nn. 20-22; Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 845.

 

[15] Cf. JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 29.

 

[16] Cf. CONC. VATICAN II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 16; Décl. Nostra aetate, n. 2; Décr. Ad gentes, n. 9; Cf. aussi PAUL VI, Exhort. apostol. Evangelii nuntiandi, n. 53: AAS 68 (1976) 5-76; JEAN-PAUL II, Lettre enc. Redemptoris missio, n. 55; CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 8.

[17] Cf. CONC. DE TRENTE, Décr. De libris sacris et de traditionibus recipiendis: Denz. n. 1501; CONC. VATICAN I, Const. dogm. Dei Filius, chap. 2: Denz. n. 3006;CONGR. POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Jesus, n. 8.

 

> Notification sur le livre du P. Jacques Dupuis, S.J., "Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux" - Page officielle du Saint-Siège

 

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13/11/2014

"Veilleurs dans la nuit": un film sur les moines et la vie monastique

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Qu’est ce qu’un moine ? Que fait-il ? Des images superbes dans un cadre enchanteur vous aideront à mieux connaître la vie quotidienne des moines et à découvrir la splendeur de la liturgie monastique à l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux.

Narration de Michael Lonsdale.

Ce film a reçu deux prix :

- Suite à sa programmation sur la chaîne KTO tout au long de la semaine de Noël 2009, il a été retenu et primé par le jury du Club Audiovisuel de Paris qui décerne chaque année les “Lauriers de la radio et de la télévision”.
Le 15 février 2010, dans les salons du Sénat à Paris, c’est le Nonce Apostolique en France, Mgr Luigi Ventura, qui a remis aux co-réalisateurs de ce film, Eddy Vicken et Yvon Bertorello, le “Laurier Première Œuvre — Prix Marcel-Jullian”, en présence de Dom Louis-Marie, abbé du Barroux.

- Il a d’autre part reçu le Prix du meilleur documentaire au Festival International du Film Catholique “Mirabile Dictu” http://www.mirabiledictu-icff.com qui s’est tenu à Rome du 7 au 11 juin 2010 sous le patronage du Conseil Pontifical pour la Culture.

Durée : 52 mn + bonus.

Sous-titrages en anglais, allemand, italien et espagnol (ainsi que français pour les malentendants).

 

> Acheter le DVD du film "Veilleurs dans la nuit"

 

Cette publication a été retirée, puis rétablie après avoir consulté les moines et obtenu leur accord.

06/10/2014

Un prêtre raconte son expérience de mort imminente

Pour supprimer les annonces encadrées en jaune, passer la souris sur le rectangle jaune, puis cliquer sur la petite croix blanche sur fond noir qui apparaît au coin du rectangle.

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01/10/2014

Comment prêche un vrai disciple de Jésus: conversion, vie chrétienne, mariage, amour de Dieu

Ce missionnaire a adopté la façon de parler du peuple auquel il a donné sa vie pour l'amour de Dieu.

"Je me suis fait tout à tous, afin d'en sauver à tout prix quelques-uns." (1 Corinthiens 9, 22)

A part quelques écarts, celui sur la flatterie notamment, on aimerait voir plus de prêtres et religieux prêcher comme lui...