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30/07/2015

Cardinal Robert Sarah : « Qu’on nous écoute ou pas, nous parlerons »

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ARTICLE | Famille chrétienne | 10/06/2015 | Numéro 1952 | Par Aymeric Pourbaix et Jean-Marie Dumont
Au prochain Synode sur la famille, les évêques africains n’ont pas l’intention de permettre que les débats soient monopolisés par l’Occident déclinant. Entretien avec leur figure de proue, le cardinal Robert Sarah. Tonique !
 
Avez-vous le sentiment que l’Afrique a été la grande oubliée du Synode sur la famille ?
Elle s’est exprimée et on ne l’a pas oubliée ! On n’a pas voulu l’entendre mais elle a bien été présente. Nous étions tout sauf silencieux !
Sur quels sujets les évêques africains se sont-ils particulièrement engagés ?
Notre souci est d’encourager, de mettre en valeur, de protéger la beauté de la famille. Sans la famille il n’y a pas de société ni d’Église. Ni même d’avenir. La famille est le lieu où l’on apprend à servir les autres, à les aimer, à leur parler, à les supporter. C’est aussi là que se transmettent les valeurs, la culture, la foi.
Quelle est la spécificité, à cet égard, de l’Afrique ?
Nous aimons la famille, notamment la famille élargie, la famille nombreuse, l’Église-famille. Nous avons conscience d’être la famille de Dieu, Père, Fils et Esprit Saint. Notre vision philosophique c’est que l’homme n’est rien sans la femme et que la femme n’est rien sans l’homme, et que les deux ne sont rien sans un troisième élément qui est l’enfant. L’enfant est une bénédiction, un don précieux de Dieu. La famille, c’est un homme et une femme qui s’aiment mais aussi qui sont ouverts à la transmission de la vie.
Vous avez l’impression que ces aspects se sont perdus en Occident ?
Regardez l’Occident qui vieillit, qui n’a pas d’enfants. C’est comme un suicide collectif.
Y a-t-il un risque de contamination, pour les Églises en Occident ?
C’est une question à laquelle il est difficile de répondre ! Si vous vous baignez dans une rivière boueuse, vous en ressortez couvert de boue ! En vivant dans un certain contexte, on risque de se laisser contaminer. Je pense que l’Église en Occident reste fidèle à sa mission. Mais il faut craindre que l’ambiance culturelle, l’absence de Dieu, la sécularisation, puissent la contaminer. Je ne dis pas que c’est fait, mais le risque est là !
Comment faire face à ce danger ?
Il faut avant tout que l’Occident retrouve ses racines, c’est-à-dire Dieu ! Nous vivons dans un contexte culturel où Dieu est absent. Les chrétiens sont dans une ambiance d’apostasie silencieuse. Tant que l’Occident ne retrouve pas les fondements de son être, son identité, sa culture chrétienne et Dieu Lui-même, je ne vois pas comment il peut revivre.
Quels pourraient être les moyens concrets conduisant à cette résurrection ?
L’évangélisation, les sacrements. Mais aussi la sacralité, la beauté de la liturgie, tout faire pour susciter une ambiance favorisant un réel contact avec Dieu. La liturgie permet ce lien vital, personnel et intime avec Dieu. C’est pourquoi il faut qu’elle soit la plus belle possible.
Le pape a évoqué la colonisation idéologique exercée actuellement par l’Occident en Asie. Vous évoquez le même sujet pour l’Afrique et vous y voyez la marque du diable…
En créant Adam et Ève, Dieu a créé la famille. Le mariage est un don que nous recevons de Dieu. Chercher à le détruire par des lois ne peut venir que du démon. Celui-ci cherche à briser l’œuvre de Dieu. C’est le cas aussi lorsqu’on redéfinit le mariage et la famille, comme cela s’est produit dans votre pays. Aucune civilisation dans l’Histoire n’a légiféré sur l’union matrimoniale de personnes de même sexe, comme vous l’avez fait l’an dernier.
Comment se passe, concrètement, cette colonisation ?
La plupart des gouvernements africains s’entendent dire : si vous n’acceptez pas la théorie du gender, si vous n’acceptez pas les droits des homosexuels, le droit à l’avortement, vous n’aurez pas d’aide financière. Le droit se trouve ainsi dénaturé. C’est la raison pour laquelle le pape dit : il faut vous rebeller, il faut dire non au colonialisme idéologique qui détruit la famille.
Connaissez-vous des pays africains qui disent non ?
Le Sénégal, par exemple. En arrière-plan se trouve la question suivante : pourquoi les pays occidentaux ne veulent-ils pas accueillir l’Asie ou l’Afrique avec leurs richesses et leurs valeurs culturelles propres ? Pourquoi penser qu’il n’y a que la manière ou la vision occidentale de l’homme, du monde, de la société, qui soit bonne, juste, universelle ? L’Église doit se battre pour dire non à cette nouvelle colonisation.
Est-ce l’un des enjeux du Synode ?
Au Synode d’octobre prochain, nous allons, je l’espère, aborder la question du mariage de façon avant tout positive, en cherchant à promouvoir la famille et les valeurs qu’elle porte. Les évêques africains interviendront pour soutenir ce que Dieu demande à l’homme sur la famille et accueillir ce que l’Église a toujours enseigné.
Les évêques africains sont-ils tous déterminés à aller dans ce sens-là ?
On n’a pas besoin de se concerter pour réaffirmer que le mariage est un et indissoluble. C’est quelque chose de connaturel ! Certains se concertent pour être plus forts, croyant que ce sont les pressions qui l’emportent. Comme si la doctrine était une question de pression ! En Afrique de l’Ouest on donne aux futurs mariés un fruit appelé la cola : la moitié au marié, l’autre à la mariée, et ils doivent la manger. Une fois que c’est fait, le maître de cérémonie dit : restituez-moi la cola comme elle était avant. Et ils répondent : c’est impossible ! Cela symbolise le fait que le mariage ne se casse pas. Même chez les païens cette indissolubilité du mariage est reconnue.
Ne peut-on pas envisager des exceptions ?
Jésus a-t-Il évoqué une exception ? Ce que Dieu a uni, l’homme ne peut le défaire. Ce n’est pas une intransigeance ni un fondamentalisme. C’est une loi de Dieu, qui veut le bien de la famille. On pourrait me dire : mais j’ai mieux réussi dans mon deuxième mariage ! D’accord, toi tu as réussi, mais tes enfants ont-ils réussi ? Et ta femme a-t-elle réussi ? La cassure d’un mariage, les brisures psychologiques et la terrible souffrance que provoque un divorce, sont-elles une réussite ? Peut-on construire sa réussite et son bonheur en imposant au conjoint et aux enfants des brisures et des souffrances humaines irréparables ?
Est-ce qu’on a assez parlé des enfants pendant ce Synode ?
On n’en parle presque jamais ! Alors que c’est le vrai drame de l’Occident. Pensez à toutes ces familles où les enfants sont ballottés entre leurs parents séparés. Et la personne qui est abandonnée, alors qu’elle avait tout donné, quelle souffrance ! Personne ne peut consoler cette cassure-là ! Or on ne pense pas à ces gens qui souffrent ! On a seulement pitié de ceux qui contractent un nouveau mariage civil et qui veulent communier. Pourquoi une telle myopie ?
Y a-t-il de vraies fractures aujourd’hui au sein de l’Église ?
Entre ceux qui suivent le Christ ou qui suivent Dieu, il n’y a pas de fracture. Le Christ est leur rocher. Si on s’appuie sur Lui, il n’y a pas de division. Ceux qui s’éloignent de Lui ne causent pas une fracture. Ils se détachent. Mais ils ne cassent pas l’Église. Ils quittent Jésus, son enseignement et son Église.
Que dire aux chrétiens qui ont été désemparés lors du Synode d’octobre dernier ?
Dites-leur de lire Dieu ou rien [le livre d’entretien avec le cardinal qui vient de paraître chez Fayard] ! Notre secours est dans le nom du Seigneur, disons-nous souvent. Ce livre a l’unique intention de consolider la foi des gens, de les rassurer, en leur rappelant que Dieu a parlé et qu’en vivant sa parole nous sommes en sécurité. Dieu a confié sa parole à l’Église. En suivant l’Église et ses enseignements, nous sommes en sécurité. Suivons courageusement et fidèlement celui qui a dit : « Je suis le chemin, la vérité et la vie  »: Jésus Christ, Lui, la Parole de Vie et la Lumière.
Malgré les épreuves ?
Oui ! Regardez : des gens meurent par fidélité à leur foi en Jésus aujourd’hui, au Pakistan, au Moyen-Orient, en Afrique. Ils meurent égorgés pour la parole de Dieu et le témoignage de leur foi. Et nous, nous voulons annihiler l’Évangile, le réduire au minimum. Que les chrétiens aient des yeux ouverts pour regarder ceux qui meurent pour le Christ. Ils sont un Évangile vivant.
Pour vous, qu’est-ce que l’Afrique apporte aujourd’hui à l’Église ?
L’Afrique a toujours été impliquée dans le projet de Dieu. Regardez la Révélation ! Lorsque Dieu a voulu établir une alliance avec l’homme, cela a commencé en Égypte. C’est l’Afrique qui a sauvé Jésus : quand Hérode cherchait à Le tuer, Marie et Joseph se sont réfugiés en Égypte. C’est un Africain qui a aidé Jésus à porter la croix : Simon de Cyrène ! Dès le départ Dieu a voulu impliquer l’Afrique dans le salut du monde. Car « ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre les sages ; ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre ce qui est fort ; ce qui, dans le monde, est sans naissance et que l’on méprise, voilà ce que Dieu a choisi pour réaliser le salut de l’humanité » (cf. 1 Co 1, 27).
Les derniers papes ont-ils pris la mesure du rôle de l’Afrique ?
Absolument ! Ils lui ont manifesté toute leur confiance. Paul VI a déclaré en 1969 : « La nouvelle patrie du Christ, c’est l’Afrique ». L’Afrique s’ouvre largement à l’Évangile, comme le montre la croissance du nombre de chrétiens, passés en un siècle de 2 millions à 200 millions (voir Repères). Benoît XVI a dit que l’Afrique était le poumon spirituel de l’humanité. Jean-Paul II, de son côté, a déclaré que le nom de chaque Africain était inscrit sur les paumes crucifiées du Christ. Autrement dit, l’Afrique, dans sa pauvreté, sa faiblesse, ses maladies… est utilisée par Dieu pour manifester sa puissance. C’est pourquoi nous voulons prendre nos responsabilités. Qu’on nous écoute ou qu’on ne nous écoute pas, nous parlerons et on entendra notre parole. Nous nous exprimerons avec respect, délicatesse, mais aussi avec force, en nous appuyant uniquement sur Dieu, notre force.
 
Repères
En Afrique, le nombre des chrétiens est passé en un siècle de 2 millions à 200 millions.
Entre décembre 2001 et décembre 2011, on y a enregistré une augmentation de:
+ 39,5% de prêtres diocésains et de religieux ;
+ 18,5% de religieux non prêtres  ;
+ 28% de religieuses.
(Annuaire 2011 des statistiques de l’Église.)
 
Le pape a récemment cité un auteur, Mgr Benson, lequel, dans son ouvrage Le Maître de la terre, décrit d’une manière prophétique beaucoup de dérives actuelles…
Ce qui se passe aujourd’hui, surtout en Occident, est une œuvre du démon. Le plus grave est de vouloir imposer ces dérives aux autres continents et cultures. On nous parle des droits de l’homme, mais n’avons-nous pas des droits nous aussi, à ne pas nous voir imposer toutes ces perversions ?
Le règne de l’Antéchrist semble plus fort que jamais…
L’Église ne doit pas avoir peur ! Le Christ a dit : « N’ayez pas peur ! » Jean-Paul II l’a redit. L’Église ne doit pas avoir peur de dire l’Évangile et sa foi en Dieu, qu’elle soit écoutée ou non. C’est sa mission. Celle reçue du Christ Lui-même !
C’est le seul vrai pouvoir qu’elle ait : le pouvoir de la parole ?
Une parole qui sauve l’humanité. Si vous parlez avec clarté et fermeté pour révéler Dieu et sa Parole de Vérité, on vous dit : c’est un fondamentaliste, c’est un intolérant. Mais ce n’est pas vrai ! Est-ce que vous êtes intolérant quand vous dites à votre enfant : mentir ou tricher ce n’est pas bien ! Si vous laissez faire, vous êtes coupable. Et l’Église peut aussi être coupable de se taire. Les chrétiens persécutés, même si on les tue, ne se taisent pas. Leur voix est plus limpide, plus forte et plus glorieuse que la haine, la violence, la confusion mentale de leurs persécuteurs. Si on a peur d’être maltraité, il suffit de regarder ceux qui, autour de nous, meurent pour Jésus, et nous retrouvons courage et force. Leur sang réveille notre foi endormie ou anesthésiée par la mondanité. Il faut aujourd’hui plus de courage à l’Église, aux chrétiens, aux évêques.
Vous le leur dites ?
Je ne dis pas que la manière de m’exprimer a la délicatesse qu’il faudrait. Cependant Jean Baptiste avait des paroles rudes et sévères. Il disait « Engeance de vipères » ! Ce n’était pas très délicat comme parole ! Jésus aussi a été très sévère : Il a fouetté les vendeurs du Temple. Il faut parfois aussi de saines et fraternelles colères comme celle de Jésus. Dieu donne une mission difficile aux prophètes : parlez, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas. Dans le livre d’Ézéchiel, il avertit et explicite la responsabilité du messager divin : quand tu vois le danger venir et que tu n’avertis pas le coupable, s’il meurt, c’est toi qui es responsable. Mais si tu l’avertis et qu’il n’écoute pas, c’est lui le responsable. Notre responsabilité c’est de dire, de parler au nom de Dieu et de Lui seul !
À temps et à contretemps ?
Oui ! En trouvant la pédagogie, la forme, la parole juste pour dire les choses sans trahir la doctrine et sans blesser les personnes.
Il faut commencer par le clergé, si on vous suit bien ?
Bien sûr ! Si le moteur est cassé, la voiture a beau avoir une belle carrosserie, elle ne bouge pas ! Le clergé est le moteur. C’est pourquoi la formation du clergé, sa vie intérieure, est fondamentale. C’est ce que le Christ a fait avec ses Apôtres : pendant trois ans, Il les a pris avec Lui, dans le désert, pour les former avant de les envoyer. Faire naître les gens à la grâce est une responsabilité que nous mendions auprès de Dieu. On n’enseigne pas et on ne conduit pas les autres à Jésus sans L’avoir soi-même rencontré. Saint Jean dit : « Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché du Verbe de Vie, nous vous l’annonçons ! » Nous ne sommes pas des professeurs qui communiquent une science apprise dans les livres, nous sommes des témoins. Si, à la fin d’une journée, vous n’avez pas eu cinq minutes avec le Seigneur Jésus, comment voulez-vous conduire les gens à Jésus et les nourrir de sa parole ?
Un évêque africain disait au Concile qu’il suffit de quelques saints pour convertir un pays…
Regardez le Curé d’Ars : n’a-t-il pas changé la France ? Mère Teresa n’a-t-elle pas changé le monde ? Les douze Apôtres n’ont-ils pas bouleversé et transformé le monde par le nom de Jésus !
La France a-t-elle pour vous un rôle spirituel spécifique à jouer ?
Ce n’est pas pour rien qu’on dit que la France est la fille aînée de l’Église. Ce n’est pas un titre, c’est une mission ! Regardez ce que la France a fait pour porter la civilisation chrétienne à travers le monde, en Afrique, en Asie. Voyez les missionnaires français qui ont parcouru le monde. Ce que je suis, ce que je dis, je l’ai reçu de vous, de la France. Je ne sais pas s’il se trouve un pays qui a produit autant de saints ! La France a un rôle essentiel à jouer, y compris du point de vue de la culture, de la civilisation. Mais si elle reste païenne, sécularisée, elle ne le fera pas.
La France, éducatrice des peuples ?
Bien sûr ! Être fille aînée de l’Église est une responsabilité. Et je pense qu’elle continue à jouer ce rôle aujourd’hui malgré les apparences. La France est le pays qui a vu naître beaucoup de nouveaux mouvements religieux. On y perçoit les signes d’une renaissance. Ce n’est pas le nombre de chrétiens qui fait la beauté de l’Église. Le printemps de l’Église, ce sont les saints que le Christ continue à susciter dans son Église. 
 
Médias et liturgie : « Le président de Guinée m'a appelé… »
«  En tant qu’Africain, je suis très surpris de voir que beaucoup de chrétiens, lors des messes pontificales à Rome, n’ont qu’une seule préoccupation : prendre des photos, et se comportent comme s’ils ne se trouvaient pas devant Dieu. Je dois dénoncer l’envahissement des médias, des photographes dans nos célébrations eucharistiques. Même les prêtres qui concélèbrent ont l’audace de prendre des photos. L’Église catholique doit réfléchir et prendre des mesures fermes devant ce phénomène scandaleux et choquant. Les autres croyants, notamment musulmans, sont écœurés et choqués de voir cela dans nos célébrations. Les processions, qui nous conduisent à la célébration du grand mystère de notre foi, sont faites sans aucun recueillement, comme si nous entrions dans un théâtre, sans aucun émerveillement, sans aucune frayeur religieuse de nous trouver face à face avec Dieu. Les célébrants bavardent et discutent sur toutes sortes de futilités en avançant vers l’autel du Seigneur  ! Pour illustrer mon propos, je vous raconte un fait. C’était la consécration de l’église de Saints-Pierre-et-Paul de Bonfi, à Conakry. Il y avait la télévision guinéenne pour couvrir l’événement, et le prêtre responsable des émissions de « La Voix de l’Évangile », qui assurait lui aussi le reportage de la liturgie. Le prêtre portait les ornements liturgiques puisqu’il concélébrait et, accroché à son cou, il avait son appareil photo et jouait sa fonction de journaliste, en même temps qu’il concélébrait. Et la télévision l’a pris en flagrant délit. L’image a été diffusée le dimanche soir. Dès le lendemain matin, le président de la République, M. Lansana Conté, qui est musulman, m’a fait appeler et m’a dit textuellement : “J’ai vu hier soir aux émissions religieuses un de tes prêtres prendre des photos pendant la prière. C’est inadmissible  ! Ce n’est pas le travail du prêtre. Le prêtre doit faire prier les fidèles. Il est le représentant de Dieu au milieu des fidèles et en même temps celui qui nous aide à être attentifs à Dieu. Il ne faut plus qu’il recommence. Si tu as besoin d’un cadreur ou d’un technicien de prises de vues pour les émissions religieuses, demande-le moi, je donnerai immédiatement la personne compétente”. En effet, ce type de compor­tement ne se vérifiera jamais dans une mosquée, car les musulmans ont plus de respect du sacré que la plupart des chrétiens. Ce qui se passe à la basilique Saint-Pierre pendant les célébrations pontificales mérite un examen sérieux. Je reconnais que les temps de silence se sont énormément améliorés. Il faut chercher à vivre la liturgie dans le plus grand respect, un profond sens du sacré et en nous tenant face à Dieu. »
Cardinal Robert Sarah
 
Aymeric Pourbaix et Jean-Marie Dumont

 

Lire l'entretien sur le site de Famille chrétienne:

> Le cardinal Robert Sarah : « Qu’on nous écoute ou pas, nous parlerons »

Famille chrétienne n°1952 du 13 au 19 juin 2015, pp. 10-15

> Acheter le numéro 1952 de Famille chrétienne

 

> Divorce et miséricorde: témoignage d'une mère abandonnée

> Jean-Paul II: "Le chrétien authentique a le devoir de rejeter énergiquement le divorce"

> Cardinal Sarah sur le synode: "Il faut plus de courage à l'Église, aux chrétiens, aux évêques"

 

29/07/2015

Un appel à la vie intérieure

Conférence prononcée au Grand Séminaire de Montréal par Dom Gérard Calvet, o.s.b., de l'abbaye Sainte Madeleine du Barroux (11 mars 1999).

dom gérard, dom gérard calvet, vie intérieure, prière, oraison, spiritualité, abbaye du barrouxPourquoi parler de la vie intérieure? Parce que, de plus en plus, nous nous apercevons que c'est la vie cachée, intérieure, qui ne se voit pas aux yeux des hommes, c'est elle qui opère le déclenchement des grands événements de ce monde.

Jésus-Christ a passé trente ans de vie cachée et personne ne savait qui il était, ce qu'il faisait. Pendant ce temps, il n'a pas prêché, il n'a pas missionné, il vivait en présence de son Père, il priait, il travaillait dans l'ombre de la face de Dieu. L'essentiel de notre vie, c'est d'être une braise sous la cendre; mais l'on sait que la braise, lorsqu'elle chauffe, est capable de faire un incendie.

Sainte-Thérèse de l'Enfant-Jésus, la grande petite sainte est morte à vingt-quatre ans sans être sortie de son Carmel et elle a été décrétée " docteur de l'Église " et patronne des missions de l'Église universelle. Pourquoi ? Pour quelle raison les Papes ont-ils voulu cela, sinon précisément parce qu'elle a permis, par la force de sa profonde vie intérieure, faite de prière et d'intercession, d'être comme François Xavier mais d'une autre façon, la patronne des missions.

Une anecdote peut vous faire saisir quelque chose de son mystère. Parmi les moines de Montserrat, au temps de la guerre d'Espagne en 1936, les Rouges sont montés à l'assaut du monastère, ils ont enfermé les moines et il y en avait deux, chacun dans un cachot séparé et on leur portait leur pitance chaque jour. Les gardiens révélèrent plus tard un fait curieux : dans une cellule, le moine chantait, paraissait heureux, le visage ouvert; pourtant son sort semblait compromis pour toujours. Dans l'autre cellule, silence de mort, le moine non seulement ne chantait pas, mais paraissait profondément déprimé et contrarié. Or, ces deux moines bénédictins menaient depuis des années la même vie, selon la même règle, les mêmes travaux quotidiens, les mêmes observances, les mêmes prières. D'où vient que l'un faisait face à l'épreuve avec joie et que l'autre était accablé ?

Vous l'avez deviné. La vie intérieure, c'est quelque chose de tellement secret, de tellement profond qu'elle ne se découvre que dans des cas exceptionnels, quand l'heure de vérité a sonné. On touche là à quelque chose de beaucoup plus mystérieux qu'un simple élan d'enthousiasme au sens moderne du mot. Il y a une douce influence de la vertu de foi dans l'âme qui transforme la vie, qui donne une sérénité, une paix, un équilibre, une force d'âme, une piété douce et continue, un instinct surnaturel qui aperçoit la main de Dieu dans tous les événements. Il y a une sorte de réussite, de victoire de la foi qui ne se découvre que dans certaines occasions. Nous sommes tous appelés à cet épanouissement de l'âme.

La vie intérieure n'est pas un abri, ni un refuge. Elle est plutôt une rampe de lancement. Ce qui a déclenché la grande civilisation du Moyen Âge avec toutes ces œuvres de charité extraordinaires, c'est la contemplation de quelques grands saints qui les ont inspirées comme saint Bernard, saint Thomas d'Aquin et autres. La vie secrète qui se nourrit de contemplation, de prière, a son rayonnement jusque dans l'action, jusque dans l'action apostolique et jusque dans l'action temporelle. De telles actions ne peuvent naître que dans les cœurs profondément épris de Dieu.

La vie intérieure est aussi le remède à l'affaissement de l'espérance. Quand on parle de l'espérance, on croit toujours que ce n'est que pour demain; par une espèce de vague optimisme, on pense que demain ça ira mieux. Non, ce n'est pas ça l'espérance. L'espérance a pour objet Dieu, la patrie céleste, l'union à Dieu, le bonheur éternel. Alors vous me direz : tout de même, vous n'allez pas me dire que sur terre il n'y a pas un petit peu d'espoir, Oui, mais dans la mesure où Dieu le permet pour soutenir notre regard vers Lui.

Depuis vingt siècles, les grands saints, les grands mystiques ne nous ont pas dit autre chose sinon qu'il y a une autre vie, un bien supérieur à tout ce que la vie terrestre peut nous proposer. Et ne croyez pas qu'il s'agit là simplement d'une spécialité pour " contemplatifs ". Non, les hommes qui ont été le plus plongés dans la vie du siècle, dans l'action, par exemple un saint Vincent de Paul, un saint Jean Bosco qui vivait en permanence au milieu des enfants pour les faire grandir en Dieu, tous ces saints très actifs étaient des géants de prière et ils puisaient leur générosité et leur force dans la vie contemplative, dans la vie intérieure.

Mère Teresa, un jour en entendant une personne lui dire : " Ah! Mère Teresa, c'est affreux, pourquoi tant de désordres dans le monde, et même dans l'Église? " Elle lui a répondu : " À cause de vous et à cause de moi ". Une grande petite sainte, Mère Teresa. Quand nous parlons de la vie intérieure, souvent les gens disent : Ah! C'est beau, c'est grand, mais comment y arriver ? Disons premièrement qu'il y a de grands obstacles à la vie intérieure. D'abord, il y a des gens superficiels, qui ne s'intéressent qu'à ce qui bouge, qu'à ce qui se voit, qu'à ce qui se mange, qu'à la télévision et qui, ensuite, nous demandent : comment est-ce que vous faites pour être tellement tranquilles, tellement serins, tellement heureux ? Blaise Pascal est un génie extraordinaire, en une phrase, on a l'impression qu'il a tout dit.

Exemple : " Tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre ". Cela ressemble à une boutade, mais c'est vrai. On bouge, on parle, on aime le bruit, on aime renouveler tout, et toujours faire du nouveau. Impossible de se stabiliser, de rester tranquille. Il faut savoir s'arrêter, faire une retraite de temps en temps. Et puis, il y a un autre obstacle qui est beaucoup plus profond encore; c'est l'amour-propre. Mais pas l'amour-propre au sens qu'a ce mot, lorsqu'une maîtresse d'école dit à un enfant : " Si vous aviez un peu d'amour-propre vous ne feriez pas tellement de taches sur votre cahier ". Elle a raison, l'amour-propre sur les lèvres de cette maîtresse, signifie le respect de soi-même, la dignité de soi. L'amour-propre désordonné de soi-même, c'est la recherche du confort, son bien, son argent, sa puissance, ses affections, on ne peut pas se donner à Jésus-Christ, on ne peut pas s'offrir, on ne peut pas imiter Jésus qui a dit : " Si quelqu'un veut être mon disciple, qu'il prenne sa croix et me suive! " Nous sommes tous invités, appelés à porter joyeusement la croix du Christ, chacun à sa mesure, chacun selon son état de vie et selon les dispositions de la Providence.

Dieu est là avec nous, un Dieu qui ne va pas nous tromper, qui va nous secourir tous les jours, qui va nous faire avancer, sur lequel nous pouvons donc nous reposer. C'est toute la spiritualité de la confiance, de l'abandon dans les mains de Dieu, dans l'amour divin. Sainte Marguerite Marie disait : " Le Cœur de Jésus est un trésor dont la confiance est la clé ". Seigneur Jésus, donnez-moi le chemin pour aller à vous, aidez-moi, secourez-moi, je désire entrer en Vous ". La vie intérieure est une vie éternelle commencée.

 

Source: Missa

> L’Évangile en un clin d'oeil - Dom Gérard Calvet

01/07/2015

Entretien avec Mgr Athanasius Schneider sur la liturgie - The Paulus Institute

 

 

Conférence de Mgr Athanasius Schneider sur la liturgie - The Paulus Institute

 

 

13/06/2015

Cardinal Sarah: "C'étaient des paroles audacieuses, mais je devais ce service à mon peuple et à Dieu"

 

Les deux premières minutes de l'émission Bibliothèque Médicis avec le Cardinal Sarah:

 

La vidéo complète de l'intervention exceptionnelle du Cardinal Sarah comme invité de l'émission Bibliothèque Médicis présentée par Jean-Pierre Elkabbach, le 10 mars 2015:

 

26/05/2015

"Quelle belle vocation d'être un vrai catholique!" - Homélie de Mgr Athanasius Schneider pour la Pentecôte au pèlerinage de Chartres

 

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MESSE DE LA PENTECÔTE

Homélie de Mgr Athansius SCHNEIDER

Pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté de Paris à Chartres, le 24 mai 2015



Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.

Mes chers frères et sœurs, nous célébrons aujourd’hui la solennité de la Pentecôte, faisant mémoire de la descente visible du Saint-Esprit sur les apôtres, quand le Saint-Esprit a rempli les cœurs des fidèles de sa présence Divine et a comblé leurs âmes de ses sept dons et surtout du don de l’amour Divin. C'est depuis ce jour que le feu de l’amour Divin a commencé à brûler dans les âmes.

Quels sont les effets de ce feu Divin? C'est la transformation de notre amour humain très faible et inconstant en un amour surnaturel. Grâce à cet amour surnaturel nous pouvons aimer Dieu avec toutes nos forces et aimer notre prochain comme nous-mêmes. Le feu de l'amour Divin dans notre âme contient surtout la vertu de force. La vertu de force a donné aux fidèles pendant deux mille ans la capacité de préférer la mort plutôt que de trahir les promesses baptismales, mourir plutôt que pécher, mourir plutôt que trahir les promesses matrimoniales, mourir plutôt que trahir les promesses sacerdotales, mourir plutôt que trahir les vœux religieux.

Pour rester fidèle aux commandements de Dieu il y a de nos jours des familles, des jeunes gens, des prêtres et des évêques qui sont souvent marginalisés, ridiculisés et persécutés par le pouvoir dictatorial de la nouvelle idéologie néo-marxiste mondiale du genre et du culte de la terre et du climat. Cependant il y a aussi des familles, des jeunes gens, des prêtres, des séminaristes et même des évêques qui sont marginalisés et ridiculisés parfois dans la sphère ecclésiale à cause de leur fidélité à l'intégrité de la foi catholique et du culte Divin selon la tradition des apôtres et de nos ancêtres.

La Pentecôte est aussi le jour de la naissance visible de l’Église, qui est la grande famille de tous les fils adoptifs de Dieu. Il y a cependant une autre création Divine qui s’appelle la famille humaine constituée par le père, la mère et leurs enfants. Notre Sauveur Jésus Christ a élevé la famille naturelle à la dignité de l'église domestique grâce au sacrement du mariage. De nos jours la famille naturelle et la famille chrétienne sont devenues l'objet principal des attaques et de la destruction du régime mondial de l’idéologie néo-marxiste du genre. Nous vivons dans le temps de la famille, paradoxalement parce qu'elle est attaquée. Aujourd’hui la famille est appelée à donner le témoignage de la beauté Divine de son être et de sa vocation.

Pour rester fidèle à sa vocation la famille catholique doit pratiquer en premier lieu la prière quotidienne commune. Le Pape Pie XII avait dit: «Nous vous en supplions, ayez à coeur de garder cette belle tradition des familles chrétiennes : la prière du soir en commun. Elle se réunit à la fin de chaque jour, pour implorer la bénédiction de Dieu et honorer la Vierge Immaculée par le rosaire de ses louanges pour tous ceux qui s'endormiront sous le même toit. Si les dures et inexorables exigences de la vie moderne ne vous laissent pas le loisir de consacrer à la reconnaissance envers Dieu ces quelques minutes bénies, ni d'y ajouter, suivant une coutume aimée de nos pères, la lecture d'une brève vie de saint, du saint que l'Eglise nous propose comme modèle et protecteur spécial chaque jour, gardez-vous de sacrifier en entier, pour rapide qu'il doive être, ce moment qu'ensemble vous consacrez à Dieu, pour le louer et lui présenter vos désirs, vos besoins, vos peines et vos occupations. Le centre de votre existence doit être le Crucifié ou l'image du Sacré-Coeur de Jésus: Que le Christ règne sur votre foyer et vous réunisse chaque jour autour de lui. » (Discours du 12 février 1941).

Ô famille catholique, pères et mères de famille, enfants, jeunes hommes et jeunes filles, n'ayez pas peur de combattre contre le péché, contre l’esprit séducteur de l’idéologie néo-païenne. N’ayez pas peur de combattre pour défendre les commandements de Dieu, pour défendre l’intégrité de votre foi et de votre chasteté. N'ayez pas peur d'être héroïques. Écoutons ce que nous disait le Pape Pie XII : «Aux temps modernes comme aux premiers siècles du christianisme, dans les pays où sévissent les persécutions religieuses ouvertes, ou sournoises et non moins dures, les plus humbles fidèles peuvent, d'un moment à l'autre, se trouver dans la dramatique nécessité de choisir entre leur foi qu'ils ont le devoir de conserver intacte, et leur liberté, leurs moyens de subsistance ou même leur propre vie. Mais aux époques normales, dans les conditions ordinaires des familles chrétiennes, il arrive parfois que les âmes se voient dans l'alternative de violer un imprescriptible devoir ou de s'exposer, dans leur santé, dans leurs biens, dans leurs positions familiale et sociale, à des sacrifices et à des risques douloureux et pressants : elles se voient mises dans la nécessité d'être héroïques et de se montrer héroïques, si elles veulent rester fidèles à leurs devoirs et demeurer dans la grâce de Dieu» (Discours du 20 août 1941).

Mes chers frères et sœurs, la famille catholique a encore une vocation qui parfois est oubliée de nos jours. C'est la vocation d'être le premier séminaire (cf. Concile Vatican II, Optatam totius, n. 2). Quelle est la nécessité la plus urgente pour l'Église et le monde de nos jours? La nécessité la plus urgente de nos jours est d'avoir des familles authentiquement catholiques qui deviennent les premiers séminaires des vocations sacerdotales et religieuses. Le Pape Jean-Paul Il avait dit aux couples catholiques: «Si Jésus avec un acte d'amour de prédilection pour votre famille, donnait à un de vos fils le don de la vocation sacerdotale ou religieuse, quelle serait votre attitude? J’espère que vous croyez dans la parole de Don Bosco qui disait : Le don le plus grand que Dieu peut offrir à une famille c’est un fils prêtre. Soyez donc prêts à recevoir ce don avec gratitude cordiale et sincère. » (Angélus, 13 janvier 1980).

Chers pères, chères mères, chers grands-pères et grand-mères catholiques, dites:« Seigneur, si Vous voulez, appelez un de mes fils, un de mes petits-fils, au sacerdoce». Jeunes hommes et jeunes filles qui sentez dans votre âme la vocation au mariage, la vocation de fonder une église domestique, dites: « Seigneur, si Vous voulez, appelez un de mes futurs fils au sacerdoce. » Et vous garçons et jeunes hommes, quelqu'un de vous pourrait dire:« Seigneur, je suis prêt à Vous suivre, si Vous m'appelez au sacerdoce. »
Quelle belle vocation d'être un vrai catholique! Quelle belle vocation de combattre pour l’intégrité de la foi et des commandements de Dieu! Quelle belle vocation d'être une famille catholique, une église domestique ! Quelle belle vocation d'être un jeune homme, une jeune fille chaste! Quelle belle vocation d'être un séminariste et un prêtre avec un cœur pur et ardent !
N'ayons pas peur du Goliath de nos jours, qu'est la dictature de la nouvelle idéologie antichrétienne mondiale. Le feu d'amour Divin et le don de force du Saint-Esprit nous rendront capable de vaincre le Goliath de nos jours avec les cinq pierres de la fronde de David.
Venez, Saint-Esprit et faites fleurir de nouveau beaucoup d’églises domestiques, lesquelles nous donneront les cinq pierres de David qui vaincront le Goliath, c'est à dire: des bons pères et mères catholiques, des purs enfants, des purs jeunes gens, des purs prêtres et des évêques intrépides.
Venez Saint-Esprit, venez! Ainsi-soit-il.

 

Source: Pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté

Notre-Dame de Paris: mot d'envoi du pèlerinage de Chartres par Dom Louis-Marie, Père abbé du Barroux

 

 

Source: Pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté

28/04/2015

Jean d'Ormesson a bénéficié de l'école à la maison

L'écrivain Jean d'Ormesson, de l'Académie française, raconte ses souvenirs de l'instruction en famille dont il a bénéficié.

Jean d'Ormesson est né à Paris le 16 juin 1925. Son père étant ambassadeur, il vit, dès son plus jeune âge, dans différents pays dont la Bavière, la Roumanie et le Brésil. Il passe une partie de son enfance au château de Saint-Fargeau qui appartenait à sa mère. Il fait ses études au Lycée Henri-IV [hypokhâgne, classes préparatoires après le baccalauréat] à Paris et intègre l'Ecole Normale Supérieure. Licencié en Lettres et Histoire, il est également agrégé de Philosophie. Il mène une carrière d'écrivain à succès et en 1971, il est récompensé par le Grand prix du roman de l'Académie française pour La Gloire de l'Empire. Il est élu Académicien le 18 octobre 1973 au fauteuil 12, précédemment occupé par Jules Romains. (Source: Notice biographique sur France Inter)

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09/04/2015

Entretien avec le père Mohan Sawhney: "Venez au Christ, la porte de sa miséricorde est ouverte"

Le père Mohan Sawhney, religieux norbertin de l'abbaye de Grimbergen et vicaire à la paroisse Notre-Dame de Laeken, a accepté de répondre aux questions d'Espérance Nouvelle.

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Que retenez-vous de l’année de la vie consacrée, d’une part au niveau de l’Église, et d’autre part sur le plan personnel, puisque vous êtes vous-même religieux ?

Ce que je retiens de l'année de la vie consacrée c’est essentiellement un rappel à ce que je suis et ce que je dois être. Quand le Saint Père nous fait la grâce de cette année, lui qui est lui-même religieux, c’est une invitation à redécouvrir la beauté de cette vie, sa fraîcheur, sa radicalité. Tout autour de nous au fond, nous voyons que les religieux meurent, on voit que les couvents ferment, qu’il n’y a pas de vocation, etc. Et quelque part c’est un coup de fouet, je pense, que le Saint Père fait à toute l’Église, en disant « écoutez, il y a une forme de vie qui est splendide, qui est merveilleuse, qui a rendu des services extraordinaires à l’Église et il ne faut pas l’oublier ».

 

Quel est selon vous le sens de l’année sainte de la miséricorde annoncée par le Pape et qu’en attendez-vous ? Que va-t-elle apporter à l’Église ?

Moi personnellement, comme tout le monde j’ai besoin de miséricorde, je pense. J’espère que ça va peut-être un petit peu réveiller les gens à redécouvrir le sacrement de la confession. Parce qu'il ne s’agit pas uniquement de dire « ah ben voilà j’obtiens miséricorde, Alléluia, et voilà. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ». Il s’agit de redécouvrir le sacrement par excellence que le Christ a institué pour obtenir cette miséricorde. Je pense que le Pape a à l’esprit de vouloir ramener des gens qui sont très loin de l’Église et de cette manière-là il veut dire d’une façon très très claire,  comme en sens inverse à l’égard de la mafia, que finalement ne croyez pas que vous êtes loin de Dieu. Dieu est plus proche de vous que vous ne l’imaginez. Profitez-en, la porte est ouverte, venez. Je crois que c’est ça.

 

Justement à propos du sacrement de la confession, que diriez-vous pour encourager les gens à se confesser, et en particulier à ceux que cela effraie ?

Ce que je dirais c’est: n’ayez pas peur, nous ne sommes pas là, nous prêtres, pour vous passer un savon. Nous sommes là plutôt pour vous donner le savon et vous allez voir qu’en vous savonnant ça sent bon, ça fait du bien. Je crois qu’il y a eu aussi une époque quand on parle avec des gens d’une certaine génération, où c’est vrai, la confession faisait peur et parfois on attrapait des remarques ou autre du prêtre ; ce n’était pas toujours amusant, il fallait y aller, qu'on le veuille ou non. Je crois que la Confession a beaucoup évolué aussi dans la façon de se confesser et dans la façon dont les confesseurs entendent les confessions. C’est essentiellement découvrir combien on peut se nettoyer l’âme. Nous nous nettoyons le corps, nous passons un temps extraordinaire au soin de notre corps avec des produits de beauté, etc., mais pour l’âme on ne fait rien. Et dans le sacrement de la confession, eh bien, c’est ça ce que l’on fait, on se soulage de beaucoup de choses. Ce n’est pas quelque chose de psychologique mais c’est quelque chose qui a trait à notre vie surnaturelle que nous avons oubliée en grande partie. Je crois que ça c’est quelque chose à vraiment redécouvrir.

 

Quel est pour vous le fondement de la vie chrétienne ?

Le fondement de la vie chrétienne c’est de vivre avec le Christ. Il n’y a pas de valeurs chrétiennes, il n’y a pas une civilisation chrétienne à défendre, il n’y a pas de slogan du parti à défendre comme si le christianisme était un parti comme le Parti socialiste ou le Parti libéral. Être chrétien c’est vivre avec Jésus. Nous voyons que ceux qui se disent chrétiens et qui ne vivent pas avec Jésus, finalement abandonnent le christianisme. C’est essentiellement cela, c’est être un disciple du Christ. C’est de là que vient le christianisme. « Christ », c’est le premier mot dans le christianisme. Si je ne vis pas avec Jésus, si je n’ai pas de relation avec lui, si je ne reçois jamais son précieux Corps, si je ne me confesse jamais, est-ce que je suis encore chrétien ? Ça c’est la question essentielle devant laquelle nous sommes placés aujourd’hui plus qu’hier il me semble.

 

C'est une bonne transition pour la question suivante : aujourd’hui en Belgique, beaucoup n’ont pas la foi ou ne pratiquent pas leur foi. En quoi s’approcher de la foi, de la prière et de la vie d’Église pourrait améliorer la vie de ces gens ? Quels motifs, quelles raisons pourrait avoir un athée, un agnostique ou un chrétien non pratiquant de s’intéresser à la foi catholique et d'entrer dans la vie de l’Église?

Je dirais à ces gens-là « ça change tout, ça change tout ». Cela me fait penser à ce que disait la reine Fabiola, c’est une façon de répondre qu’elle avait : « ça change tout vous savez ». C’est vrai qu’une fois qu’on a le Christ, tout devient clair. C’est un peu comme dans cette pièce où nous sommes, elle est sombre si j’éteins la lumière. Et si j’allume l’interrupteur, tout s’éclaire, tout devient lumineux, tout est distinguable. Avec le Christ, tout change, notre façon de voir les choses, notre façon de voir les gens, de parler, et sans le Christ, tout est terne, tout est sombre. Le Cardinal Sarah qui est responsable dans la Curie romaine de la liturgie, a publié un livre au titre très évocateur : Dieu ou rien. Je ne dirais pas que ceux qui n’ont pas Dieu n’ont rien dans leur vie, c’est peut-être un peu fort, mais il y a de la vérité là-dedans. Qu’a produit cette société libérée par la révolution française deux cent ans plus tard ? Est ce qu’elle est aussi libre, est-ce qu’elle est aussi heureuse, est ce qu’elle est aussi libérée qu’elle le prétend ? Moi je ne pense pas. Eh bien j’oserais dire « venez au Christ ». Je sais bien que l’on a pu faire beaucoup de choses sur le Christ, mais ces choses ne sont pas toujours liées à lui. Le Christ est toujours vrai, le Christ est toujours présent. Il suffit de le redécouvrir et de venir chez lui. C’est ça l’essentiel.

 

Selon vous, de quoi les gens ont-ils le plus besoin dans notre pays ? Ou qu’est-ce qui leur manque le plus ? Et la même question pour les chrétiens en particulier, de quoi ont-ils le plus besoin dans notre pays ?

Ce qui frappe le plus en Belgique et dans les pays avoisinants quand on revient de l'étranger, c’est le manque de joie. Dans tous ces autres pays, il y a mille et un problèmes tellement criants. Et finalement, bien souvent, les personnes qui n’ont pas grand-chose, sont des gens qui sont joyeux. Et je pense que la joie c’est aussi le dérivé de la foi. La foi procure une joie immense. Le Pape Paul VI de bienheureuse mémoire, a publié il y a x années, une exhortation apostolique sur la joie. Je crois que c’est quelque chose à redécouvrir. Je peux avoir beaucoup d’argent, c’est ce que la majorité des Belges ont, ils ont une vie confortable, et d’ailleurs le sondage qui a paru dans la presse la semaine dernière disait que la majorité des Belges sont heureux, mais est-ce qu’ils sont joyeux ?  Est-ce qu’ils ont vraiment cette étincelle au cœur ? Et je crois que c’est ça ce qui manque à notre société, c’est cette joie ! Et ça se voit. Quand on voit les gens dans les pays pauvres, souvent les gens sont joyeux et témoignent aussi d’une affection que l’on ne rencontre plus ici. Et ça je souhaiterais à notre continent de redécouvrir.

 

Quel est le dernier pays étranger dans lequel vous avez séjourné ?

J’ai pris des vacances il y a deux ans donc il y a un petit temps. C’était en Italie à Florence où j’étais allé voir toutes les merveilles de la Toscane. Mais sinon un pays où je me rends depuis mon enfance, c’est l’Inde. Un pays de mille et un problèmes qui ne seront pas résolus avec le développement économique que l’on nous promet. Mais un pays qui a une âme, un pays qui a des valeurs propres et une civilisation et une culture extraordinaire à découvrir. Ça vaut le voyage.

 

Encore une petite question personnelle : vous avez des origines indiennes alors ?

Oui, je suis indien. Donc mon nom un peu sauvage, « Mohan », est un nom typiquement indien. C’est-à-dire que c’est mon père qui est indien. C’est mon père qui est indien et qui a immigré ici dans les années soixante. Ma mère est belge et je suis né et j'ai grandi ici. Donc finalement je n’ai de l’Inde que des attaches familiales de par mon père. Ce sont mes origines.

 

Vous êtes religieux norbertin, vous appartenez donc à l’Ordre des Prémontrés fondé par saint Norbert de Xanten. En quoi consistent essentiellement la règle et la vie des norbertins et quelles sont les principales spécificités de cet ordre religieux ?

C’est une question qui pourrait m’entraîner pendant des heures mais je vais essayer d’être bref. Les prémontrés donc, ont cette caractéristique qu’ils vivent en communauté. Ce ne sont pas des moines, ce sont des chanoines réguliers, grande différence. C’est-à-dire que nous ne sommes pas contemplatifs : à côté d'une vie presque monastique, à Grimbergen en ce qui me concerne, donc une vie centrée sur l’office qui est solennellement chanté comme dans une abbaye, en même temps nous avons un apostolat à l’extérieur, en général dans les paroisses. Nous suivons la règle de saint Augustin qui est une règle très ancienne, si pas la plus ancienne encore en vigueur, puisqu’elle remonte au IVème siècle. C’est ce que nous vivons à Grimbergen depuis l’année 1128. Donc nous ne sommes pas des derniers venus dans l’Église, surtout pas en Belgique, où nous avons eu énormément de rayonnement, énormément de paroisses, et nous avons fondé et fait beaucoup de choses.

 

Pouvez-vous dire un mot sur la vie de saint Norbert ?

C’est une vie un peu étrange dans le sens où c’est un noble qui n’a absolument pas envie d’être prêtre et religieux, puisqu'on l’envoie dans un monastère comme on le fait au Moyen-Age avec le cadet d’une famille noble. Et voilà qu’il rencontre le Christ, et voilà qu’en une fois il se convertit d’une manière phénoménale et cela va l’amener à fonder notre ordre, à tout quitter, à vivre dans la pauvreté, lui qui était riche, et à redécouvrir finalement ce pourquoi il était entré dans la vie religieuse. Alors il a beaucoup de péripéties...C’est une figure qui est pleine de feu. Saint Bernard, qui était son ami, un autre grand réformateur de l’Église, disait : « Norbert se distingue par sa foi. » Il a une foi extraordinaire dans le Saint-Sacrement et dans la messe, qu’il célébrait tous les jours, ce qui apparemment à l’époque était rare, ça commençait à peine à se faire, et il célébrait avec une grande foi. Et je pense que ça c’est une des grandes spécificités de saint Norbert, c’est cette foi, c’est cette vigueur, c’est cet amour de feu pour le Christ.

 

En Belgique il y a sept abbayes occupées par des communautés de chanoines prémontrés dont une en province de Namur, une à Bruxelles et cinq en région flamande, donc l’Ordre Prémontré semble s’en tirer assez bien face à la crise des vocations qui a touché notre pays. A quoi attribuez-vous cette bonne santé des abbayes prémontrées en Belgique ?

Je crois que c’est un cocktail de beaucoup de choses, c’est-à-dire que le fait que nous vivons ensemble, cela attire des jeunes qui ont envie de devenir prêtre mais n’ont pas envie de se retrouver seul dans un presbytère. Nous ne sommes pas des communautés coincées, c'est-à-dire où il faut presque demander la permission pour remuer le gros orteil, dans certaines communautés c’est un peu comme ça. Chez nous, il n’y a pas cela. Il y a cette sagesse des siècles et il y a aussi cette souplesse qui permet de vivre dans ce monde, mais en même temps d’avoir la beauté de la liturgie, la chaleur de la vie fraternelle et une certaine tradition. Voilà, je crois que c’est ce petit cocktail-là qui attire les jeunes.

 

Comment décririez-vous une journée typique d’un chanoine prémontré à l’abbaye de Grimbergen où vous vivez ?

Alors d’abord c’est une journée qui commence tôt, puisque nous nous levons tous pour l’office du matin, qui chez nous commence à sept heures du matin. C’est une vie qui est rythmée sur la liturgie. Nous avons les laudes, nous avons la messe conventuelle tous les jours, qui est chantée, nous avons l’office du milieu du jour, l’office des vêpres, et entre tout cela nous avons nos paroisses. Par exemple, si moi j’ai un enterrement dans ma paroisse à Notre-Dame de Laeken, eh bien après la messe conventuelle, je me dépêche pour aller célébrer cet enterrement. Il y a tout le reste aussi, recevoir les gens, visiter les gens, préparer les baptêmes, les mariages, écouter les confessions, recevoir en direction spirituelle, écrire des sermons, écrire éventuellement une retraite, tout cela, ça remplit mes journées. Et le soir il y a les réunions, ça on n’y coupe pas dans les paroisses aujourd’hui (rires).

 

L'abbaye de Grimbergen et les autres abbayes prémontrées accueillent-elles des visiteurs, ou des hôtes, des groupes, ou certaines activités ouvertes à des personnes de l’extérieur ?

Bien sûr, comme toute abbaye qui se respecte, nous avons des hôtes, des gens qui viennent pour visiter les lieux, certaines abbayes plus que d’autres, la nôtre un peu moins, mais il y a des abbayes qui ne font pratiquement que cela, accueillir des gens du matin jusqu’au soir. C’est un charisme qui est propre aux communautés religieuses et cela attire parfois des gens qui ne vont pas aller spécifiquement dans une paroisse, parce qu’il y a toujours dans chaque abbaye quelque chose d’un peu magique qui attire les gens.

 

On peut faire un séjour à Grimbergen ?

Oui, on peut faire un séjour à Grimbergen, mais évidemment ce sera un séjour en néerlandais puisque la communauté est néerlandophone, et vous savez que quand on est sur la frontière linguistique, les gens sont toujours un peu plus tranchés sur leurs positions. Mais bon, nous sommes ouverts à tout le monde bien entendu.

 

Vous servez également en paroisse à Notre-Dame de Laeken. Quelles sont vos activités et responsabilités dans le cadre de cette charge pastorale ? Parmi les différents aspects de cette charge, lequel préférez-vous ? Ou bien qu’est-ce qui vous touche le plus dans l’exercice de cette charge ?

Cela fait presque vingt ans que je suis vicaire dans cette paroisse. Je vois les choses évoluer aussi. Ce qui me touche le plus, ce que j’aime le plus dans le travail paroissial, c’est le fait que j’ai contact avec monsieur tout le monde, et surtout monsieur qui ne va jamais à l’église. C’est vraiment monsieur tout le monde, et on voit dans une grande paroisse de ville, la population changer et évoluer. Ce que j’aime beaucoup c’est prêcher. Prêcher le dimanche à ce public qui est intéressé mais qui n’est pas toujours des plus convaincus. J’aime aussi les baptêmes, c’est moi qui ai la pastorale des baptêmes, et il y a quelque chose de très beau dans le rituel du baptême. C’est le début : sans le baptême, on ne devient pas chrétien. Ça ce sont les choses, essentiellement, que j’aime beaucoup dans ma charge de vicaire paroissial.

 

Pouvez-vous dire un mot sur vos travaux ou autres activités ?

Les travaux que j’ai fait c’est essentiellement être fidèle à ma vie religieuse. Mon travail essentiellement c’est de prêcher, c’est de vivre la vie religieuse. Je suis aussi relié à une radio flamande qui s’appelle « Radio Spes » qui émet depuis la basilique de Koekelberg. Tous les soirs depuis vingt ans, j’ai la prière du soir à 21h, qu’on peut également suivre sur internet, c'est sur 105FM pour ceux qui habitent Bruxelles. On peut m’entendre à cette heure-là, en néerlandais, faire les prières du soir. Ce sont là essentiellement mes travaux, si je puis dire ainsi.

 

Quelles sont selon vous les clés de l’évangélisation, ou de la réenvangélisation, au XXIème siècle ?

 Je crois que c’est être authentique, être vrai, c’est ça qui attire. Quand on voit toutes les choses nouvelles qui fleurissent dans l’Église, alors que l’on dit que l’Église va mourir, on voit que ce sont des choses qui sont vraies, qui sont authentiques, qui sont fidèles à l’Évangile, c’est ça la clé de l’évangélisation, le reste finalement, on le voit, ça meurt.

 

Quel conseil général donneriez-vous aux jeunes qui voudraient découvrir la foi et l’Église ?

D’abord venez voir. Venez à l’église. Ça ne sert à rien de rester derrière son ordinateur, ce n’est pas comme ça que l’on découvre l’Église. Et allez dans des communautés qui rayonnent. C’est vrai qu’il y a des paroisses qui meurent, où il n’y a plus que dix personnes. Je dirais que ce n'est pas là que vous allez découvrir la vie de l’Église. Venez dans les communautés où il y a des jeunes, où il y a une belle liturgie, et où il y a de belles choses qui se font en dehors.

 

On parle parfois aujourd’hui de crise au niveau des vocations, pas seulement les vocations religieuses et sacerdotales, mais aussi les vocations au mariage et à la vie de famille. Qu’est-ce qui est indispensable, qu’est-ce qui est recommandable, pour qu’un jeune chrétien, une jeune chrétienne réponde à la vocation qui est la sienne ?

Vous avez très bien dit, à propos des vocations religieuses, que ce n’est pas seulement un problème lié aux vocations religieuses, c’est un problème général dans l’Église, il y a un manque de foi dans l’Église. Et donc, les vocations religieuses et sacerdotales viennent de la foi des fidèles, et s’il y a moins de foi chez les fidèles, il y aura moins de vocations religieuses et sacerdotales. C’est toujours la même chose. Mais je dirais que ce qu’il faudrait pour rallumer la flamme, c’est essentiellement plus de conviction, plus de foi, plus de prière. S’il n’y a pas ça dans un peuple chrétien, et bien il n’y a plus de peuple chrétien. Toutes ces grandes familles catholiques où on voit qu’il n’y a plus rien finalement, ils ont des beaux noms et de beaux passés, avec de beaux arbres généalogiques et des grandes familles qui ont donné des évêques, des prêtres et des religieuses, mais aujourd’hui elles ne donnent plus rien parce que très souvent elles ne prient plus, très souvent il n’y a plus de vie de foi et c’est ça qu’il faut redécouvrir. C’est la foi, c’est la prière, c’est la fidélité à l’enseignement de Jésus.

 

Qu’attendez-vous de la seconde assemblée du Synode des évêques convoqués par le Pape sur le thème de la famille en octobre 2015 ?

Ce que j’en attends, c’est que la famille soit encouragée, voilà ce que j’en attends. Le reste c’est de la spéculation et du blabla de journalistes, qui nourrit parfois de grandes attentes chez certains. Moi ce que j’en attends c’est que la famille soit renforcée.

 

On a parfois l’impression que l’Église est divisée en différentes tendances au niveau théologique, pastoral, spirituel, liturgique, etc. Qu’est-ce qui peut rétablir ou renforcer l’unité de cette Église qui apparaît parfois aussi divisée ?

D’abord cesser de dire du mal l’un de l’autre, ça fait le jeu de ceux qui ne sont pas de notre famille, ça les arrange bien que nous soyons divisés. Arrêter de diviser l’Église, ça vaut pour toutes les chapelles, tous les clans, toutes les divisions. Et ça vaut aussi pour tous les journalistes, qui souvent, même s’ils se disent chrétiens, écrivent des bêtises et divisent, et diabolisent les gens. Et ça je crois que c’est très mauvais. Pour le reste, le seul juge de la vérité des mouvements, c’est le temps. Le temps montrera ce qui vient de Dieu et ce qui ne vient pas de Dieu. Ce qui ne vient pas de Dieu va mourir, et ce qui vient de Dieu continuera à prospérer parce que c’est Lui qui est derrière.

 

> Le site internet de l'abbaye de Grimbergen: www.abdijgrimbergen.be

 

Comment Fréjus-Toulon est devenu pionnier le la nouvelle évangélisation: "C'est par la grâce que chacun peut donner le meilleur de lui-même selon les dons qu'il a reçus de Dieu"

La Vie consacre son dernier numéro à la fin ou la résurrection du catholicisme en France. Le journal dresse un panorama de l’Eglise en France, en grande difficulté à bien des niveaux. Toutefois, il s’est penché sur le cas peu commun du diocèse de Fréjus-Toulon, véritable laboratoire de la nouvelle évangélisation :

« Les faits sont là : le diocèse de Fréjus-Toulon, qui correspond au département du Var, avec son million d’habitants, est celui qui ordonne le plus de prêtres par habitant en France. Il en compte actuellement 252 en activité et 93 en mission à l’extérieur, un chiffre en croissance constante et qui suffit pour assurer une présence dans chaque paroisse. Cinq jeunes hommes y ont embrassé le sacerdoce l’année dernière, alors que le grand diocèse de Lyon en a seulement ordonné trois.

Premier moteur de ce renouveau, Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, annonce d’emblée que l’important est de « partir des besoins des gens ». Depuis 15 ans qu’il assure son ministère, il assume ce pragmatisme. Des traditionalistes aux charismatiques en passant par les fidèles les plus classiques ou les militants du CCFD-Terre solidaire, tout le monde est le bienvenu. L’évêque a aussi fait venir des dizaines de communautés étrangères spécialisées dans l’évangélisation. Selon lui, un des rôles de l’Église est de permettre la « fertilisation » – un de ses maîtres mots – entre gens de cultures différentes. »

Mgr Dominique Rey est à la tête depuis 15 ans de ce diocèse dynamique, où le nombre de prêtres est suffisant et en augmentation. Il explique :

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« Si vous deviez résumer votre stratégie d’évangélisation en quelques points, que mettriez-vous en avant ?

Plusieurs points structurants. Le premier est la dimension du primat de la grâce. On peut avoir des idées, prendre des initiatives, mener des programmes pastoraux, mais ce qui est préalable à toute notre action, c’est d’abord ce que Dieu fait à travers nous. Je relie le dynamisme du diocèse à la présence d’une forte vie contemplative. On a la chance d’avoir de nombreuses communautés monastiques ici : des cisterciens, les moines de Lérins, des chartreuses, des bénédictines, etc. Ils forment un support dans la vie intérieure. Ce qui nous renvoie au fait que le premier ressort de l’évangélisation, plus que des entreprises personnelles, c’est la capacité de revenir aux sources de la mission : la source sacramentelle, en particulier l’adoration eucharistique.

Donc, la « stratégie », ce n’est pas d’abord des techniques d’évangélisation…

Non. Mais le deuxième pilier est la place donnée aux charismes au sens large et à la manière de vivre l’évangile suivant ce que l’on porte. Nous avons cette intuition : ce n’est pas la taille de la chaussure qui détermine la pointure du pied, mais l’inverse. Or, nous avons connu des pastorales qui parfois nous ont enfermés dans des schémas contraignants, soviétiques. Alors qu’il faudrait au contraire partir de ce que chacun reçoit comme don de la grâce de Dieu, pour ensuite donner le meilleur de soi-même. De nombreuses communautés viennent de l’extérieur. Certaines sont nées de l’intérieur. »

Source: L'exemple vient de Fréjus-Toulon